Imposition des géants américains: la tension monte entre l’Union européenne et les États-Unis

(VOVWORLD) - Le 11 juillet dernier, le Sénat français a définitivement adopté la loi qui instaure une taxe sur les services numériques visant entre autres les quatre géants américains Google, Apple, Facebook et Amazon. Le 17 juillet, c’était au tour du gouvernement espagnol d’annoncer qu’il préparait une démarche similaire. L’initiative, qui semble séduire plusieurs pays d’Europe, pourrait être à l’origine d’une guerre commerciale avec les États-Unis.
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Madrid mettra en place une taxe sur les géants du numérique dès qu’un nouveau gouvernement aura été mis en place, a déclaré mercredi la ministre espagnole de l’Économie par intérim, Nadia Calviño. «L’idéal serait qu’une solution mondiale soit trouvée, car il s’agit d’un problème mondial», a-t-elle souligné.

Pour rappel, le gouvernement de Pedro Sanchez avait adopté en janvier un projet de loi pour créer une taxe de 3 % sur les revenus générés par certaines activités des géants du numérique comme les Gafa (Google, Apple, Facebook, Amazon). Mais comme le Parlement espagnol avait rejeté son projet de budget 2019, il a été contraint de convoquer des élections anticipées en avril, élections dont son parti est sorti vainqueur.

Une volonté de récupérer des impôts perdus

Si la France a instauré la taxe Gafa et que l’Espagne s’apprête à faire de même, c’est pour récupérer le manque à gagner fiscal que ces géants du numérique leur doivent. En effet, toutes ces sociétés ont réalisé d′importants bénéfices grâce à leurs activités en Europe, mais n′ont payé qu’un minimum d′impôts. La Commission européenne a révélé que les multinationales du numérique bénéficient d’un taux d’imposition moyen de 9,5 %, contre 23 % pour les entreprises traditionnelles.

Après avoir échoué à faire front commun en Europe, la France a décidé d’agir seule. C’est ainsi que le Sénat français a adopté, le 11 juillet, l’instauration d’une taxe de 3 % visant les entreprises qui réalisent un chiffre d’affaires sur leurs activités numériques de plus de 750 millions d’euros dans le monde, dont 25 millions d’euros pouvant être rattachés à des utilisateurs localisés en France. Avec cette taxe rétroactive à compter du 1er janvier 2019, Paris espère augmenter son budget de 500 millions d’euros par an. L’Espagne s’apprête aujourd’hui à suivre son exemple.

Mais la France veut aller plus loin. Elle exhorte les sept pays les plus industrialisés du monde à trouver une solution internationale sur la taxation des géants du numérique. Néanmoins, lors de leur réunion tenue les 17 et 18 juillet à Paris, les ministres des Finances du G7 ne sont pas parvenus à un consensus.

Une situation qui laisse planer le spectre d’un conflit commercial

Les démarches actuelles de la France et de l’Espagne, qui sont pourtant des alliés de longue date des États-Unis, risquent de déclencher une guerre commerciale entre l’Amérique et l’Union européenne. D’autant plus que d’autres pays de l’Union envisagent aussi de taxer Facebook et Amazon. Au Royaume-Uni, le gouvernement de Theresa May a élaboré un projet de loi qui prévoit de taxer à 2 % les sociétés technologiques qui réalisent un chiffre d’affaires de plus de 500 millions de livre sterling dans le monde, dont 25 millions grâce aux utilisateurs britanniques. Une fois entrée en vigueur, cette loi devrait rapporter au Royaume-Uni 1,5 milliard de livres sterling sur quatre ans. Des propositions fiscales similaires sont apparues en Autriche et en Italie. Les pays moins peuplés, tels que l’Irlande et le Luxembourg, attendent une démarche commune de l’Union européenne.

Évidemment, l’administration américaine ne peut pas rester les bras croisés. Le président Donald Trump a ordonné une enquête visant le plan français, en vertu de la loi commerciale de 1974, la même loi qui avait justifié le déclenchement d’une guerre commerciale avec la Chine. Elle autorise le président des États-Unis à recourir à des mesures fiscales pour faire face aux éventuelles attaques commerciales d’autres pays contre des intérêts américains. Les taxations prévues par l’Europe pourraient être considérées comme faisant partie de ces attaques. Et jusqu’à présent, l’arme fiscale américaine semble n’avoir épargné aucun adversaire. Les derniers noms de la liste des victimes sont d’ailleurs, pour la plupart, des alliés, voire des partenaires stratégiques de la Maison Blanche. C’est pourquoi il est fort à parier qu’une ère de tension commerciale des deux côtés de l’Atlantique est sur le point de s’ouvrir.

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