Georges Simenon, un «Usain Bolt» de la littérature

(VOVWORLD) - Il y a près de 30 ans, disparaissait l’un des grands maîtres du polar, celui qui allait donner le jour à la série des «Maigret». Impossible à la délégation Wallonie-Bruxelles de passer cet anniversaire sous silence, d’où cette idée d’organiser une «année Georges Simenon» en 2019. Alors 2019, ce n’est pas tout de suite, allez-vous me dire, mais justement, pour faire patienter le public, la délégation a choisi de faire venir Nicolas Ancion, l’auteur de «Quatrième étage» et de «L’homme qui valait 35 milliards», à Hanoï. Cette étoile montante de la littérature francophone a présidé jeudi, en collaboration avec les éditions Nha Nam, un séminaire sur… Georges Simenon, bien sûr!  
Georges Simenon, un «Usain Bolt» de la littérature - ảnh 1Photo: Penguin U.K. 

193 romans, 158 nouvelles, plusieurs œuvres autobiographiques, sans compter des centaines d’autres ouvrages et articles parus sous divers pseudonymes… 3.500 traductions en une cinquantaine de langues, avec des tirages cumulés atteignant près de 800 millions d’exemplaires… Le moins que l’on puisse dire de Georges Simenon (1903-1989), c’est qu’il fut un écrivain prolifique. Il reste en tout cas  l’auteur belge le plus lu dans le monde et l’écrivain de langue française le plus traduit au cours du 20ème siècle. C’est bien simple: dans toute l’histoire de littérature francophone, cet homme au sang d’encre est le troisième auteur de langue française après deux Français, Jules Verne et Alexandre Dumas. 
Mais j’ai déjà trop parlé. La seule chose que je pourrais rajouter, c’est que la «déferlante Simenon» a gagné le Vietnam… 

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Revenons-en donc au séminaire d’aujourd’hui qui a lieu à Manzi, au 31 Phan Huy Ich. La salle est archi-bondée de jeunes bibliophiles francophones, ce qui en dit long sur l’accueil réservé aux romans de Georges Simenon. Beaucoup de questions sur le style, les oeuvres mais aussi la face cachée de cet écrivain illustre vont être posées, et c’est à Nicolas Ancion, un auteur en vogue de la littérature francophone, qu’elles le seront.   

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«Quand j’étais petit, Simenon était encore vivant», nous raconte-t-il. «C’était la star des écrivains belges et même des écrivains francophones de roman policier, il n’y a pas de doute. C’était l’image de l’écrivain qui était né dans la même ville que moi et qui est parti du même endroit. Ça a évidemment un peu marqué l’imaginaire d’un enfant qui aime bien les histoires, qui aime bien lire et qui a eu, un jour, envie d’écrire aussi.»
Tous les hommes de génie possèdent eux-mêmes un ou des talents hors série. Comme Jules Verne et Alexandre Dumas, les deux premiers auteurs de langue française les plus traduits dans le monde, Georges Simenon, en tant que le numéro 3, est aussi un «Usain Bolt» de la littérature.
«Il avait une technique d’écriture très rituelle», précise Nicolas Ancion. «Il se levait tous les matins à 4 heures et puis il se mettait au travail. A sa machine à écrire, il travaillait 4-5 heures le matin. Il pouvait donc écrire un roman en une semaine. Son roman «Le train», je ne sais pas combien de temps il a fallu pour le traduire, mais lui, il a dû mettre 7 jours pour écrire». 
Avec son rendement extraordinaire, Georges Simenon a pu donner naissance à 5 romans par an sans compter d’autres ouvrages, toutes ses œuvres ayant la particularité d’être vraiment faciles à lire et à comprendre.

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«Il y a moins de mots dans toutes les oeuvres de Simenon que dans un seul livre de certains auteurs. En fait, Simenon a écrit quelque chose comme 2.000-3.000 mots, pas plus, et c’est pour ça qu’il touche beaucoup de gens. C’est l’image même de la littérature vivante», nous explique Nicolas Ancion.
Avec sa langue française belle mais simple, l’auteur belge le plus lu dans le monde préfère décrire des «gens d’origine modeste et d’intelligence moyenne» et leurs drames personnels intimes d’une plume populaire, mais pleine de sentiments et d’émotions.
«Les vrais personnages de Simenons sont des anti-héros. Ce ne sont pas des gens qui accomplissent des choses héroïques. Il s’intéresse à des gens simples, des employés, des ouvriers et il revient à tout temps aux questions: Pourquoi est-ce que l’humain a de telle faiblesse? Pourquoi est-ce que l’humain tue? Pourquoi est-ce que l’humain est lâche? Pourquoi est-ce que l’humain fuit ses responsabilités? Pourquoi est-ce que l’humain est raté? C’est ça qui est intéressant. Ce qui est aussi formidable, c’est qu’il était un auteur extrêmement populaire. «Le train» est un bon exemple d’un roman autour de la lâcheté», estime Nicolas Ancion.

Georges Simenon, un «Usain Bolt» de la littérature - ảnh 6 Photo: Duc Quy/VOV

«Le train»? Avec ce qui Nicolas vient d’en dire, on a bien évidemment envie de le prendre et de ne surtout pas le rater. Oui, mais pour les lecteurs qui n’ont pas eu la chance d’apprendre notre belle langue française? Eh bien, voilà une raison supplémentaire de s’inscrire de toute urgence à l’un des nombreux cours intensifs que dispense l’Institut Français. «Pourquoi apprenez-vous le français? Pour lire Simenon dans le texte»…  Et pourquoi pas, après tout? Bon allez, que les lecteurs vietnamiens se rassurent, les éditions Nha Nam ont traduit et publié «Le train» : «Chuyến tàu định mệnh», tel est l’intitulé.

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Céline Mariage, qui est du genre à dévorer les romans policiers de Georges Simenon, nous en donne tout de suite un avant-goût:
«C’est un livre qui parle d’un homme qui est un lâche et qui ne veut pas s’engager dans la guerre, mais qui est complètement en dehors de l’histoire et c’est pour ça c’est intéressant parce que c’est un anti-héros», nous dit-elle. «Ce n’est pas un héros comme on voit dans les romans normaux et traditionnels avec des pouvoirs, des grandes qualités,... C’est un homme comme tout le monde. Et c’est ce qui est intéressant chez Simenon, c’est qu’il va décrire des gens comme vous et moi, les gens les plus simples en fait.»  
Les oeuvres de Georges Simenon ont déjà conquis des centaines de millions de personnes. Les quelques adaptations télévisées de «Maigret» qui ont été réalisées y sont bien sûr pour quelque chose, mais rien n’aurait été possible sans cette plume unique en son genre.    

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