Dào Dinh Tuan-un chef « artiste »

(VOVworld) - En 30 années de carrière radiophonique, j’ai eu le privilège de côtoyer deux personnes qui m’ont particulièrement marqué : le journaliste-poète Tran Ngoc Thu, chef du Département des émissions thématiques et le journaliste-compositeur Dào Dinh Tuân, chef du Département des émissions internationales (VOV5), que je voudrais évoquer plus particulièrement aujourd’hui.

Dans le travail ou au quotidien, ces deux hommes étaient toujours considérés comme des modèles d’optimisme et de précision. Même dans les moments les plus critiques, ils pouvaient s’offrir le luxe de composer des poèmes ou des chansons. « Je signe. Tu endosses la responsabilité ! », nous disaient-ils, non sans malice. « Responsabilité », le mot était lancé, comme un encouragement à tous les jeunes reporters ou rédacteurs que nous étions. Il faut dire aussi que tout cela nous ramène aux années 1986-1996, c’est-à-dire au début du Renouveau, une période de grande évolution pour la Voix du Vietnam, aussi bien en termes d’organisation que de production.      

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Dào Dinh Tuân (deuxième à gauche) et des collègues de VOV5

 En 1992, la direction de la Voix du Vietnam a passé l’émission destinée à la diaspora vietnamienne à l’étranger du Département des actualités (VOV1) au Département des émissions internationales (VOV5). J’ai alors eu l’honneur de travailler avec ces deux journalistes, ces deux artistes, qui étaient l’un et l’autre extraordinairement attentifs et dévoués aux jeunes. Dào Dinh Tuân - focalisons-nous maintenant sur sa personne - que je connaissais déjà depuis une bonne dizaine d’années était très calme, même aux moments les plus critiques, lorsqu’il fallait traiter des actualités brûlantes ou préparer des commentaires sur l’évolution des relations vietnamo-américaines. A cette époque, sans téléphone satellitaire, ni Internet, nous devions travailler avec les télégrammes de l’Agence vietnamienne d’Informations. Le Vietnam et les Etats-Unis ont finalement normalisé leurs relations diplomatiques en 1995 et je dois dire que VOV5 a réussi à couvrir tout le processus malgré d’évidentes difficultés, ne serait-ce que sur le plan de la logistique.  

Dans un organe de presse officiel tel que la Voix du Vietnam, où l’information est traitée intensément au fil des heures, les journées s’apparentent souvent à de véritables marathons. Or, il n’était pas rare qu’en fin d’après-midi, depuis la fenêtre du bureau de Dào Dinh Tuân, au deuxième étage du 45 rue Bà Triêu, on entende des sons de guitare ou des chants. Notre chef terminait souvent sa journée de travail en musique, entouré de quelques membres du groupe musical de la radio, en interprétant ses propres compositions ou celles de Vũ Thiết et Thanh Tùng, deux jeunes rédacteurs du département de la musique qui travaillaient au premier étage. Les interprètes étaient des journalistes travaillant dans différents services de VOV5. Un petit tonnelet de bière à pression, quelques cannettes de bière 333 et des cacahuètes achetées dans la rue ou sinon un petit verre de whisky ou de cognac offert... De la musique... Qu’elles étaient douces et insouciantes, ces fins d’après-midi !... Heureuse époque !     

Dans son bureau, Dào Dinh Tuân a écrit toute une série de chansons sur la baie d’Halong. « Je ne sais pas si mes compositions ont contribué à ce que l’UNESCO honore la baie de Halong comme patrimoine naturel mondial pour la première fois », se hasardait-il, en discutant avec d’autres artistes... Une chose est sûre : cette série de chansons lui a permis de devenir membre de l’Association des compositeurs du Vietnam.  « Le crépuscule et la nostalgie », notamment, a faisait les délices de Tuân-le Japonais, pseudonyme du journaliste Luu Anh Tuân, chef de la section d’Asie du Nord-Est de VOV5, lui-même issu d’une formation musicale. En 1995, Dào Dinh Tuân a dû être hospitalisé. Il ignorait de quel mal il souffrait, il en parlait comme d’une « maladie d’amour ». C’était bel et bien une maladie, en tout cas, à tel point que les nédecins lui ont interdit toute activité physique ou intellectuelle. Mais un matin, Dào Dinh Tuân a murmuré à Tuân-le Japonais qu’il venait de composer une nouvelle chanson. Il lui a montré son manuscrit... écrit au dos d’un relevé d’électro-cardiogramme !...

Quel que soit dans le travail ou dans la vie quotidienne, Dào Dinh Tuân était toujours d’un optimisme qui n’avait d’égal que son professionnalisme. Dans les années 1990, face au manque de reporters pour les émissions en langues étrangères dont l’audience augmentait, il a proposé à la direction de la Voix du Vietnam de recruter et de former de jeunes reporters pour ces émissions, dont celle en japonais, alors très suivie par les investisseurs nippons arrivant en masse dans notre pays.  Des diplômés en anglais ou en d’autres langues vivantes ont donc été recrutés. Ils ont reçu une double formation : en japonais et en journalisme.     

Ancien élève du lycée Albert Sarrault, maîtrisant parfaitement le français et l’anglais, Dào Dinh Tuân était l’un des plus fervent soutien de la radiodiffusion moderne en langues étrangères décidée par la direction de la Voix du Vietnam au moment où le pays commençait à s’ouvrir au monde. En 1995, un journal FM de 10 minutes en français a vu le jour avec des reportages sur la vie quotidienne d’une durée de 3 minutes, des dépêches reflétant tous les aspects de la vie sociale, des actualités politiques et économiques. Pour la radiodiffusion vietnamienne, c’était une petite révolution qui en annonçait d’autres.   

Je me souviendrai toujours du clin d’oeil et du sourire aimable de « tonton Tuân-l’édenté » (pseudonyme donné par ses collègues) lorsqu’il m’a convoqué pour aller à Ho Chi Minh-ville couvrir l’anniversaire de la libération du Sud et de la réunification nationale le 30 avril 1997. Il m’a dit: « Il nous faut un reportage éclair. Il faut que tu partes tôt. Prends l’avion pour te rendre immédiatement à Ho Chi Minh-ville ! ». C’était une grande faveur, accordée habituellement - et aujourd’hui encore - aux responsables de département ou aux reporters seniors, mais pas au jeune reporter que j’étais alors !...  Mais ainsi était Dào Dinh Tuân : soucieux de donner une chance à chacun.   

La Station des émissions internationales (VOV5) de la Voix du Vietnam souffle cette année ses 70 bougies. Les reporters, les rédacteurs et les présentateurs de l’ancien Département des émissions internationales, actuelle Station des émissions internationales, sont fiers d’avoir leur propre hymne, « Notre Voix », composé par le journaliste-compositeur Dào Dinh Tuân. Cette chanson éveille la fierté de chacun d’entre nous: « Depuis ici, nous portons notre voix à tous les coins. Depuis ici, notre voix est transmise sur les cinq continents »./.

 

  

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