Le repaire des ferronniers

(VOVWORLD) - Le village de Đa Sỹ est le berceau de plusieurs célébrités nationales. Situé dans l’arrondissement de Hà Dông à Hanoï, il est également connu pour être l’un des plus anciens repaires de ferronniers de tout le delta du fleuve Rouge.   

Le repaire des ferronniers - ảnh 1

Avant de porter le nom que nous lui connaissons aujourd’hui, Đa Sỹ s’est appelé  Sẽ, Đan Khê, Huyền Khê ou encore Đan Sỹ. Ce n’est que vers le milieu du 18ème siècle que le village a pris son appellation définitive. C’est en revanche sous le règne du 18ème roi Hung, c'est-à-dire bien avant, que la ferronnerie y est devenue l’activité artisanale numéro un.   

Au début, les villageois ne fabriquaient que des armes rudimentaires - lances, coutelas, épées… - et des instruments aratoires. C’est plus tard, sous la dynastie des Trân, au 13ème siècle, que  Đa Sỹ, qui ne s’appelait pas encore Đa Sỹ, est devenu très officiellement un village corporatif. Il aura fallu, pour cela, que deux ferronniers venus de la région de Thanh Hoa, Nguyên Thuât et Nguyên Thuân, vinssent enseigner leur savoir-faire aux gens du village.     

Le repaire des ferronniers - ảnh 2Dinh Công Doan, vice-président de l’association des artisans du village de Đa Sỹ

De nos jours, Đa Sỹ fait partie de l’arrondissement de Hà Dông, et plus précisément du quartier de Kiên Hung. Naturellement, la physionomie du village a considérablement changé au cours des âges. Il n’empêche. On devine encore un ancien quartier d’artisanat, dans lequel la ferronnerie tient toujours une place essentielle. Dinh Công Doan, vice-président de l’association des artisans du village de Đa Sỹ :

« La ferronnerie  reste, et de loin, l’activité principale. Ça représente à peu près les quatre cinquièmes de l’activité, ici, c’est dire !... Chaque ferronnier a ses petits secrets. Mais seuls les meilleurs sont capables de fabriquer un peu de tout, et là, je dirais que ça fait une petite vingtaine de personnes... »        

Le repaire des ferronniers - ảnh 3Nguyên Hông Phân, un ferronnier de Đa Sỹ

Les produits de Đa Sỹ sont réputés pour leur solidité et leur finesse. Ils se vendent non seulement au Vietnam, mais aussi à l’étranger, y compris dans des pays lointains comme la France, l’Allemagne et même les Etats-Unis. Il faut dire que les ferronniers de Đa Sỹ maîtrisent particulièrement bien les techniques de trempage et qu’ils vous font des couteaux acérés à souhait : c’est à faire pâlir de jalousie  un armurier de Tolède !... Nguyên Hông Phân, un ferronnier de Đa Sỹ :

« Les artisans de Đa Sỹ ont une manière bien à eux de tremper l’acier ou de confectionner les tranches de couteaux. Ce sont des secrets qui sont jalousement conservés, d’ailleurs. Ici, on arrive à fabriquer des couteaux en série, sans que jamais la qualité ne s’en ressente. Regardez, la tranche est droite et mince comme une feuille de papier… C’est le trempage qui fait ça ! Et nos techniques de trempage, on ne les trouve dans aucun manuel : elles se transmettent de bouche à oreille. C’est très rapide le trempage : une seconde à peine. Après, on met l’acier à reposer, soit à l’air libre, soit dans de l’huile, soit sur un tronc de bananier, mais le plus souvent, c’est à l’air libre : c’est comme ça qu’on obtient un acier brillant, d’un bleu limpide… »       

A Đa Sỹ, on est donc ferronnier de père en fils et on le reste, en dépit de la pénibilité du métier. Pénibilité amoindrie du fait de l’arrivée de machines modernes capables d’alléger la tâche et de décupler la productivité, mais pénibilité tout de même… 

Le plan de préservation et de valorisation de la ville de Hanoï inclut bien sûr Đa Sỹ. Dinh Công Doan, à nouveau :

« On vient de construire une zone industrielle de 13,2 hectares pour nos ferronniers. Ça devrait permettre de réduire un peu la pollution, mais aussi d’expérimenter de nouveaux outils technologiques. »   

Đa Sỹ fait très officiellement partie des villages d’artisanat modèles du Vietnam : un honneur qui ne doit rien au hasard et qui vient récompenser le labeur acharné des ferronniers du village, lesquels poussent le zèle jusqu’à célébrer la mémoire de Nguyên Thuât et Nguyên Thuân le 27ème jour du 3ème mois lunaire et le 25ème jour du 8ème mois lunaire, soit les jours anniversaires de leurs décès respectifs.

Eh oui, si à Đa Sỹ les lames sont bien trempées, les caractères ne le sont pas moins !...

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