Etats-Unis-Afghanistan : une brèche inattendue

(VOVworld) - Les relations entre les Etats-Unis et l’Afghanistan sont mises à l’épreuve. Deux semaines après l’incinération d’exemplaires du Coran dans une base américaine en Afghanistan, un soldat américain a abattu par balles 16 civils, pour la plupart des femmes et des enfants. Cette affaire, qui a eu lieu dimanche dernier, a ravivé la tension, plongeant la coopération stratégique entre les deux pays à son plus bas niveau. 


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photo : leparisien.fr


Le président américain Barack Obama s’est engagé à activer l’enquête sur le massacre du 11 mars. Le porte-parole de la Maison Blanche a pour sa part déclaré que les objectifs stratégiques des Etats-Unis en Afghanistan ne changeraient pas, que les Américains maintiendraient leur engagement à démanteler, à désarmer et à anéantir les forces d’Al Qaïda en entraînant les Afghans. Toutefois, ces tirs barbares ont anéanti tous les efforts de paix que les Etats-Unis et les pays occidentaux peinent à instaurer dans ce pays.

Le vague d’indignation a vite gagné l’ensemble du territoire afghan. Lundi, le parlement déclare que les Afghans ont perdu patience devant des actes commis par les soldats étrangers. Le président Hamid Karzai parle alors d’un acte “d’assassinat et de terrorisme” impardonnable. Les Talibans jurent de venger les “Américains cruels et malades” qu’ils qualifient, sur leur site web, “d’agresseurs et d’assassins cruels”. Selon un responsable du gouvernement afghan, cette affaire risque de compromettre les efforts visant à obtenir un accord stratégique avec Kaboul qui autoriserait une présence américaine sur du long terme dans ce pays.

Venons-en aux faits : Dimanche 11 mars, un soldat américain, sorti d’une base militaire de Kandahar, a tiré sur des habitants de deux villages, faisant au moins 16 morts, essentiellement des civils femmes et enfants. La Force Internationale d’Assistance à la Sécurité dirigée par l’OTAN a arrêté ce soldat, promettant une sanction sévère. Mais, pour l’opinion publique, cette affaire est celle de trop. 10 ans après le renversement du régime taliban, la sécurité n’a toujours pas été rétablie. Le réseau Al Qaïda ne se limite plus à l’Afghanistan et au Pakistan, il a gagné désormais le Moyen-Orient, l’Afrique et l’Asie du Sud-Est. Sur le plan économique, l’Afghanistan aurait besoin de 10 milliards de dollars supplémentaires pour se reconstruire en intensifiant son exploitation minière, élargissant ses exportations, renforçant sa gestion financière et sa lutte contre la corruption. Dans une récente étude, la Banque Mondiale a prévu qu’après 2014, le budget afghan connaîtrait chaque année un déficit de sept milliards de dollars. L’armée afghane serait incapable de combattre sans aide financière extérieure. Pendant ce temps, le pays est devenu le royaume de la drogue. 90% des plantations de pavots du monde sont en Afghanistan, à en croire les chiffres de l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime. De 2005 à 2009, le nombre de dépendants d’héroïne en Afghanistan a triplé, soit 150 000 personnes, auxquelles s’ajoutent les 230 000 autres qui consomment de l’opium.

Suite au massacre du 11 mars, le mince espoir de parvenir à un partenariat stratégique entre les Etats-Unis et l’Afghanistan s’étiole. Or, début mars, les deux parties avaient souhaité mener des discussions sur ce thème, sur le processus de réconciliation de Kaboul qui passe pour être la clé au conflit afghan, ou encore sur le transfert de la sécurité aux afghans. Après l’incinération d’exemplaires du Coran, Washington a réussi à apaiser la tension en signant, vendredi, un accord transférant la prison centrale de Bagram, où sont détenus des centaines de militants présumés d’Al Qaïda et des Talibans, au gouvernement afghan. Mais, la tuerie de dimanche a ouvert une nouvelle brèche. La colère du peuple à l’égard des soldats étrangers est vive. Plus dangereux encore, les Talibans ont saisi cette occasion pour inciter les Afghans à se révolter contre les Américains. Dans ce contexte, les relations américano-afghanes sont une nouvelle fois fragilisées, rendant de plus en plus incontrôlable la situation en Afghanistan.
 

Anh Huyen


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