Jean-Claude Servais : la BD, voilà un nouveau langage

(VOVworld) - La bande dessinée est reconnue aujourd’hui comme un art à part entière en Belgique, le « 9e art ». Un grand nombre de bandes dessinées francophones sont d'origine belge. La bande dessinée y a là une histoire, avec ses précurseurs et ses maîtres, ses techniques et ses courants, ses festivals et même son musée... Pourtant, pour la plupart des Vietnamiens, elle ne présente qu’un intérêt limité, lui préférant de loin les mangas japonais ou encore aux manhwas sud-coréens. Avec Jean-Claude Servais, scénariste et dessinateur de bande dessinée belge, très connu sous le pseudonyme Jicé, on va tenter de vous faire changer d’avis ; en découvrant ce fleuron de la tradition belge !


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Jean-Claude Servais


Jean-Claude Servais : La spécialité belge, on a eu des grands auteurs comme Hergé, Franquin, Roba, etc, tous les grands maîtres de la BD. On a de grandes maisons d’édition du Lombard, Dupuis, Casterman. Et à cette époque-là, c’était vraiment l’époque du développement de la BD. Donc, c’est pour ça qu’en Belgique, la BD est vraiment bien ancrée dans l’esprit des gens, à la fois par les auteurs et par les éditeurs. Vous allez en Belgique, dans n’importe quelle librairie grande surface, il y a des BD, ça fait partie de notre culture et forcément, nous sommes des maîtres en la matière. A une certaine époque, il y avait plus d’éditeurs et plus d’auteurs en Belgique francophone qu’en France. Donc, ça faisait une différence qui était anormale. Maintenant, les Français ont attrapé un peu leur retard et c’est vrai qu’il y a plus de maisons d’édition de leur côté et d’auteurs. Maintenant, nous attendons le Vietnam qui prend le train en marche mais qui doit encore suivre un certain chemin pour pouvoir faire découvrir la BD au grand public. Quand on était gamin, on voyait des BD partout, on a appris le langage de la BD. Ici, il faut le faire sans doute d’une façon un peu plus rapide avec le public vietnamien, mais je pense que c’est possible. Il y a toute une régulation à faire quand même avec le public, pour qu’il comprenne le langage qui est bien spécifique de la BD.


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"Aux marches du palais" - son oeuvre



VOV5 : Comment-a-t-on fait chez vous ?

Jean-Claude Servais : Il y avait de la BD partout, donc, le public avait de la BD à portée de main, on a baigné dans la BD. C’est ça qui a fait toute la différence. Ici, vous devez démarrer dès maintenant, et vous allez devoir aller plus vite que nous parce qu’il y a des auteurs qui sont déjà à notre niveau européen, donc, il va avoir une période de transition, eh bien, faire comprendre aux gens que la BD est un langage, une écriture en même titre que le cinéma, que le roman, que ce n’est pas du tout un art mineur. Il y a des mauvaises BD, il y a de très bonnes BD, des mauvais romans, des bons romans, c’est la même chose. Donc, il ne faut pas.... Mais c’est vrai qu’il y a des a priori par rapport à la BD et on l’a vécu chez nous aussi comme « la BD est une sous-littérature » ou « c’était la littérature pour les gens un peu débiles », des choses comme ça ! Ce qui est totalement faux, voilà c’est un nouveau langage !


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Les Stroumpfs



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.... et Tintin sont des personnages représentatifs de la BD belge



VOV5 :  Quels sont les genres de la BD belge ?

Jean-Claude Servais : A une époque, on est vraiment spécialisé dans la BD humouristique avec les éditions Dupuis : des gros nezs, des garçons la gaffe, et autres éléments de l’humour dans ce sens là. Bon, c’est un peu péjoratif de dire c’était la BD gros nez, mais ça c’est un peu les Français qui disaient ça. Nous, les plus grands succès « Hormis Astérix », ce sont Belges.

VOV5 :  Y-a-t-il des BD proprement pour les garçons, pour les filles ou pour les adultes ?

Jean-Claude Servais : Bien sûr ! Il y a des BD qu’on appelle « tout public ». C’est souvent de l’humour et qui s’adresse à tout le monde. Il y a des BD qui s’adressent aux filles, aux garçons, il y a des BD adultes. Moi, j’appartiens à ce monde là, je fais des BD adultes, adolescents. « Adultes » ne veut par dire des BD érotiques, loin delà, c’est une BD qui a une démarche adulte dans le sens où on raconte des histoires qui sont profondes, qui sont proches du roman, qui sont psychologiques, tout ça. Dans le temps, ça n’existait pas, c’est tellement plutôt de superhéro ou d’humour, mais maintenant, on peut vraiment faire une BD d’auteur et c’est ce que je fais depuis des années.


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"Jicé" devant son chevalet de peintre



VOV5 :  Comment vous est arrivée l’idée de faire de la BD ?

Jean-Claude Servais : Quand j’étais gamin, je lis des BD. Je fais des BD à l’âge de 12 ans, et j’ai toujours dessiné, dessiné.... je n’avais qu’une idée en tête, c’était faire ce métier là. Donc, mes parents à l’époque ont fait un métier artistique, comme ça, faire de la BD, parce que la BD n’était pas bien considérée à cette époque là un peu comme ici maintenant. C’était plus de 40 ans surpositionner et je voulais absolument faire ça. Quand j’avais de temps libre, je dessine. J’ai appris le métier par moi-même, j’ai fait une école des Beaux-Arts, mais uniquement au niveau du bac, j’ai pas été plus loin. A cette époque là, il n’y avait pas encore de cours de BD, donc, j’ai appris par moi-même et j’allais voire des personnels pour leur montrer des planches, comme ici, je vois des jeunes dessinateurs vietnamiens. Ces personnels là m’ont critiqué mon travail, et c’est comme ça que je peux évoluer et arriver à trouver mon propre style par la suite.


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"Tendre Violette" - une publication qui fait remarquer Jicé



VOV5 :  Vous êtes influencé par quelqu’un ?

Jean-Claude Servais : Bien sûr, j’étais influencé par des gens comme Paul Cuvelier, comme Giget, comme Girault, comme Herman. Voilà, c’est comme ça qu’on s’inspire, on n’invente pas le monde tout seul. Et en regardant ce que les autres font, qu’on arrive à se nourrir et quand on a de la personnalité, on sait utiliser ce qu’on a appris et le transmettre sous sa plume.

VOV5 :  Vos projets ?

Jean-Claude Servais : Je continue, pour l’instance, je suis en train de faire une histoire de 2 tomes qui est basé sur l’historique, sur Godefroy Bouillon et les croisades. Au Vietnam vous ne connaissez pas ça mais en Europe, ça nous avait quand même beaucoup marqué et ça reste ancré dans l’esprit des gens./.

Thu Hang

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