Rencontre avec Louis Héliot, un dictionnaire vivant du septième art

(VOVworld) - Conseiller cinéma et coordinateur des programmes cinématographiques du centre Wallonie-Bruxelles à Paris, Louis Héliot vient d’animer un atelier-séminaire au studio national du film documentaire et scientifique à Hanoi. La signification est-elle le critère le plus important du court-métrage ? L’un des fondateurs du festival prestigieux de court-métrage belge francophone "Le court en dit long" nous éclaire tout de suite.

Rencontre avec Louis Héliot, un dictionnaire vivant du septième art - ảnh 1


Un film d’un format court peut en dire beaucoup plus qu’un long-métrage. Évidemment, s’il y a du sens, c’est mieux. Mais le cinéma n’est pas forcément là pour délivrer des messages, mais c’est effectivement pour donner du sens à la vie. Chaque réalisateur doit avoir un point de vue, un regard particulier et singulier, qui nous permet de regarder la vie, tel que nous, citoyens, sans ce regard particulier, sans cette focalisation, cet éclairage qui est apporté, ce cadrage qui est présenté, on ne verrait pas la situation de la même façon. Donc je pense qu’il y a des films, des courts-métrages ou des longs-métrages, des fictions ou des documentaires, qui nous aident à vivre, qui nous permettent de percevoir le monde autrement, c’est un peu comme des livres ou des chansons qui vous accompagnent, qui vous aident à grandir et à voir le monde autrement.

VOV : A part le format, quelle est, selon vous, la particularité du court-métrage ?

C’est vrai que, sa définition c’est son format. Du coup son format court lui permet toutes les audaces, toutes les expérimentations possibles. Vous pouvez avoir une liberté totale dans la création du court-métrage, sans doute beaucoup plus que dans la réalisation de long-métrage qui, elle, répond à des normes plus précises, de production, de rentabilité, de financement... Il y a une inventivité, une création, une liberté dans le court-métrage que vous trouvez difficilement dans les autres formats. Tous les cinéastes qui comptent aujourd’hui sont passés par le court-métrage.

VOV : Que pensez-vous des courts-métrages vietnamiens ?

Pendant le séminaire on regarde à la fois des films belges francophones et des films vietnamiens, pour croiser les regards et voir comment se fait le travail d’un côté ou de l’autre... Effectivement on a regardé deux courts-métrages vietnamiens de deux styles différents. Le premier film, c’est « J’ai 30 ans », réalisé par une jeune réalisatrice, qui mêle à la fois le cinéma, des prises de vue réelles et toute une allégorie poétique, qui fait qu’on perd un peu de sens de la narration. Et à l’inverse, il y a « Lundi, mercredi, vendredi », trois journées dans la vie d’un couple, où l’histoire est simple, la réalisation efficace, avec quelques petites trouvailles.  

VOV : Donc il existe des différences dans la réalisation des films entre les pays asiatiques et les pays occidentaux...

Je pense qu’il y a une faculté dans les pays asiatiques à avoir accès à une certaine poésie, une narration non-cartésienne, plus facilement que dans les pays européens. C’est comme si vous aviez un imaginaire sur-développé. Vous avez des éclairs de génie, de lucidité, de translucidité. Effectivement il y a dans certains films, que ce soit au Japon, en Thaïlande ou au Vietnam, une poésie et une narration non-cartésienne qui peut donner lieu à des films magnifique où un spectateur européen peut se perdre complètement comme dans une jungle, ou on est transporté sur une jonque, en pleine baie d’Halong, dans le brouillard.

VOV : Que souhaitez-vous transmettre aux cinéastes vietnamiens à travers cet atelier de quatre jours ?

Je vois en même temps leur sérieux, leur envie de découvrir, d’apprendre. Je suis très heureux d’être à leur disposition toute la journée, pour répondre à toutes leurs questions. J’espère leur transmettre ce goût à la fois de l’efficacité, de l’importance qu’on doit apporter au scénario, à la préparation, et effectivement, pour avoir un maximum de liberté sur le plateau ou au moment du tournage quand on filme un documentaire. Plus on a préparé, plus on a étudié en amont, plus on sera apte à répondre aux imprévus qui vont surgir au moment du plateau. Je souhaite partager cette passion, cette envie du travail de la préparation pour essayer d’atteindre ce moment de liberté qui fait la force d’un moteur, d’un cinéaste.

VOV : Actuellement, il y a de plus en plus de jeunes vietnamiens qui se lancent dans la réalisation de films, notamment de courts-métrages. Quels sont vos conseils pour eux ?

Que ce soit pour les jeunes vietnamiens ou les jeunes belges, mes conseils restent les même. Soyez vous-mêmes. On a maintenant la chance d’avoir accès à une facilité de tourner et de monter. Vous pouvez tout faire quasiment chez vous, avec votre ordinateur et différents logiciels. Donc effectivement ça, c’est devenu tellement facile. Mais attention, ce n’est pas parce que tout le monde prend des photos avec son téléphone portable, qu’on est tous des photographes et qu’on fait des photos qui peuvent être exposées dans les plus grands musées. Donc ce n’est pas parce qu’on peut tous faire des films, qu’on est forcément cinéaste, mais en même temps, ceux qui sont vraiment cinéastes, c’est en tournant des films de plus en plus. C’est en faisant qu’on apprend, qu’on évolue. Et mon souhait le plus cher, c’est qu’on puisse voir des films vietnamiens de plus en plus de par le monde.

Commentaires

Autres