(VOVWORLD) - Pour les Tày de la province septentrionale de Cao Bang, Phu Ngoc est le haut-lieu du tissage de brocatelles.
Photo Thu Hang/VOV5
|
Les brocatelles Tày disposent d’un fond blanc opaque sur lequel surgissent des motifs résultant d’une parfaite harmonie entre couleurs claires et sombres, chaudes et froides. Selon Hoàng Thi Nhuân, qui est une spécialiste de la culture Tày, ces motifs traduisent la conception de l’Univers de cette ethnie.
«Dans la conception des Tày, l’Univers est comme une fleur dont les huit pétales correspondent aux huit principales directions: nord, sud, est, ouest, nord-est, nord-ouest, sud-est, sud-ouest», explique-t-elle. «Leurs motifs de décoration sont d’ailleurs essentiellement des fleurs. Des fleurs de couleurs éclatantes surgissent sur fond de fleurs de couleurs ternes qui représentent la Terre. Il faut savoir que dans l’esthétique Tày, tout ce qui surgit sur Terre est de couleur éclatante».
Photo Thu Hang/VOV5 |
Les Tày comptent à l’origine une bonne vingtaine de motifs de fleurs et d’animaux. Les différentes générations de tisserandes - puisqu’il s’agit traditionnellement d’une affaire de femmes - n’ont cessé d’enrichir ce patrimoine, comme nous l’affirme Nông Thi Thuoc qui a reçu le titre d’artisane populaire.
«Nous avons inventé et continuons d’inventer de nouveaux motifs de décoration pour mieux être dans l’air du temps. Nous y pensons à tout moment, même en allant au champ. Nous imaginons le motif et réfléchissons sur les couleurs, sur le nombre de fils nécessaires et sur la manière de les entrelacer», précise-t-elle.
Nông Thi Thuoc - Photo Thu Hang/VOV5 |
Dans cette commune, Luông Noi est le seul village qui puisse se targuer d’avoir su préserver toute la quintessence du savoir-faire traditionnel. Ses maisons sur pilotis abritent une trentaine de métiers à tisser. Ce village cinq fois centenaire fait désormais partie des attractions majeures du parc géologique de Non Nuoc Cao Bang, un site classé au patrimoine mondial de l’UNESCO.
Les femmes Tày tissent leurs couvertures, leur portes-bébé, leurs draps et leurs vêtements. Si leur métier à tisser, en bois et en bambou, reste aussi rudimentaire qu’il l’était du temps de leurs ascendantes, leur technicité force l’admiration. Tout est question d’imagination. Les tisserandes reproduisent les motifs de décoration sans recourir à aucun modèle, affirme Nông Thi Thuoc.
«Avant de tisser, nous devons calculer mentalement combien il nous faudra de fils et de couleurs pour reproduire tel ou tel motif. Certains motifs nécessitent seulement une vingtaine de tiges de bambou, d’autres des centaines pour fixer les fils», explique-t-elle.
En effet, les Tày de Cao Bang utilisent des tiges de bambou pour fixer les fils sur leur métier à tisser. À chaque configuration de tiges de bambou correspond un motif décoratif. Chaque fois qu’elles veulent changer de motif, elles doivent changer l’installation des tiges.
Et c’est comme cela que les Tày préservent leur savoir-faire ancestral qui aujourd’hui a acquis d’autres valeurs, économique et touristique.