(VOVWORLD) - Détenteurs
d’un riche patrimoine culturel, les Co Tu, peuple vivant sur les Hauts-plateaux
du Centre, sont particulièrement fiers des sculptures qui ornent leurs maisons
tombales. Grâce à ces œuvres, chacune de ces dernières demeures révèle des
secrets du caractère et des goûts du défunt.
Autour de la
maison, se trouvent des sculptures variées à souhait: tortues, serpents,
varans, hommes vieux, jeunes, tristes, larmoyants, heureux, jouant du gong,
chantant, tuant un buffle… - Photo Dan Tri
|
Cap
aujourd’hui sur un village Co Tu typique, situé dans les hauteurs du district de
Tay Giang, dans la province centrale de Quang Nam. Installées près
de l’entrée du village, les maisons tombales attirent tous les regards
avec leurs toits inclinés décorés de carrés rouges, turquois et blancs. Attardons-nous
un instant sur l’une d’entre elles. Sur les pignons, trônent deux têtes de coqs
au regard majestueux. L’ensemble de cette structure de deux mètres de haut repose
sur quatre piliers. Les entraits prennent la forme de pythons. Autour de la
maison, se trouvent des sculptures variées à souhait: tortues, serpents,
varans, hommes vieux, jeunes, tristes, larmoyants, heureux, jouant du gong,
chantant, tuant un buffle… C’est l’image de leur vie quotidienne que les Co Tu
choisissent de reproduire sur la dernière demeure des leurs, explique Blei Bo,
un patriarche du village d’A Do, dans le district de Tay Giang.
«Vous
trouvez dans une maison tombale beaucoup de sculptures de buffle, de coq et de
chien, nous dit-il. Quant aux hommes, ils sont représentés dans tous les états
d’âme possibles et imaginables. La maison tombale est notre plus belle création
architecturale. Nous en sommes tous fiers. En fait, quand on meurt, on se
débarrasse de notre corps, mais notre âme demeure. Elle va s’installer dans
cette maison tombale. Plus la personne est riche, plus sa maison tombale est
belle. Sa construction nécessite parfois cinq à six ans de préparation.»
«La
maison tombale est le visage de celui qui la construit», résume A Da Nhat, un
sculpteur de la commune d’A Vuong.
«Dans
la maison tombale, on reproduit, en sculpture, tous les biens précieux que le
défunt a accumulés de son vivant, y compris le tigre qu’il a tué lors d’une
chasse. Car tout cela traduit son pouvoir et son courage», nous explique-t-il.
Mais
il y a aussi autour des maisons tombales de nombreux masques effrayants, rouges
et noirs, et même un dragon ayant une tête de coq, un corps de serpent et une
queue de poisson qui est gravé sur la paroi, de l’avant à l’arrière de
l’édifice. C’est un symbole éducatif représentant le génie de l’eau. Avec les
masques, il a pour mission de chasser les mauvais esprits et de protéger les
villageois et l’âme du défunt.
«Ce
dragon est un outil pédagogique et spirituel des patriarches qui disent aux
villageois «Comportez-vous correctement, sous peine d’être punis par ce dragon»,
nous précise A Da Nhat.
Nous
en venons maintenant à l’objet principal de la maison tombale: un long cercueil
en bois. La face supérieure est décorée de motifs de tortue, de varan, de
cercle et de fleurs jaunes et rouges. Les deux extrémités représentent deux
têtes de buffles minutieusement sculptées. Offrir un beau cercueil à ses beaux-parents
de leur vivant était autrefois un moyen pour un gendre d’exprimer sa gratitude
envers ceux-ci, explique Luu Hung, ancien directeur adjoint du Musée
d’Ethnographie du Vietnam:
«Qu’un
gendre offre un cercueil à son beau-père force l’admiration de tout le village,
nous dit-il. Autrefois, pareille générosité lui valait la main d’une deuxième
femme qui lui serait donnée par sa belle-famille.»
Vous
l’aurez compris, c’est par la maison tombale que les Co Tu font montre de leur
richesse et de leurs ambitions. Alors évidemment, le bois choisi doit être le
meilleur. Il s’agit dans la plupart des cas du bois de fer pluriséculaire qui
résiste à la fois aux termites et aux intempéries.