(VOVWORLD) - Créé à l’initiative du Français d’origine vietnamienne Nguyễn Nhất Lý, qui est par ailleurs co-fondateur du Nouveau Cirque du Vietnam, le club de «ca trù» Kim Đức a désormais pignon sur rue, dans l’arrondissement de Tây Hô.
Le «ca trù», aussi appelé «A đào», «Cửa Đình» ou «Nhà Trò» est une forme d’art traditionnel apparu à la fin du 15ème siècle et au début du 16ème siècle, qui a connu son apogée à la cour royale dans les années 1930, et une consécration définitive avec sa reconnaissance par l’UNESCO en tant que «patrimoine culturel immatériel nécessitant une sauvegarde d’urgence». C’était en 2009.
Bien, ces choses étant précisées, fermons maintenant les yeux et laissons-nous porter par les mélopées tantôt graves tantôt aigues qui caractérisent l’univers du «ca trù».
Photo: Duc Quy/VOV5 |
Nous sommes au 21 rue Tô Ngoc Vân, dans l’arrondissement de Tây Hô, à Hanoï.
Sur la «scène», qui consiste en fait en une natte déposée au milieu de la salle, une chanteuse habillée en «áo dài» de velours bordeaux, chante de beaux poèmes anciens, scandés par une claquette de bois, le «phách», qu’elle tient dans ses mains. A côté d’elle se trouvent deux instrumentistes. L’un joue du tambour, le «châu», et l’autre d’une cithare rectangulaire à trois cordes, le «đáy».
La foule nombreuse, silencieuse et concentrée, comprenant des locaux mais surtout des visiteurs, assiste aujourd’hui à une représentation captivante du club Kim Đức.
«C’est une des choses les plus intéressantes qu’on peut entendre sur le plan musical, à Hanoï. Pour une oreille occidentale, c’est particulièrement surprenant», nous confie Sylvain, un spectateur français.
Même son de cloche du côté de Joelen, une Américaine.
«C’est tout à fait intéressant», nous dit-elle. «La combinaison entre les artistes est vraiment fantastique.»
L'artiste émérite Phó Thị Kim Đức. Photo: VNP |
Une combinaison fantastique entre les artistes, c’est vrai… Reprenons maintenant cette combinaison à son point de départ, c’est-à-dire la fondatrice du club, une certaine Phó Thị Kim Đức. Née dans une famille de cinq générations d’artistes (son père possède lui-même son propre club baptisé Khâm Thiên), cette artiste émérite, aujourd'hui octogénaire, baigne dans le «ca tru» depuis la plus petite enfance. Mais ce n’est que depuis qu’elle est à la retraite qu’elle peut consacrer tout son temps et son énergie au chant des courtisanes.
«Je me suis lancée dans l’enseignement, il y a de ça une bonne dizaine d’années», nous explique-t-elle. «C’est le seul moyen de transmettre mon savoir-faire et mes connaissances aux jeunes générations. Et puis j’ai eu la chance de rencontrer Nhất Lý et là, j’ai pu commencer à entrevoir la lumière au bout du tunnel. Grâce à lui, mon club a maintenant un lieu bien à lui. C’est très important parce qu’on peut y organiser régulièrement des spectacles et avoir un plus large public.»
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De toutes les disciples de Phó Thị Kim Đức, la chanteuse Bạch Dương est non seulement la plus douée mais aussi la plus opiniâtre à vouloir sauvegarder le «ca trù»
«Avant, c’était une affaire de famille», se souvient-elle. «Il y avait des familles dans lesquelles tout le monde pratiquait le «ca trù». Kim Đức, elle, s’est toujours battue pour préserver cet art traditionnel et je la comprends parfaitement. On a dû soulever des montagnes pour arriver à faire vivre ce club, mais voilà: on y est arrivée et maintenant, il y a une génération prête à entretenir la flamme. C’est formidable!»
Certes, la «génération prête à entretenir la flamme» a encore beaucoup à faire pour se hisser à la hauteur de celles qui l’ont précédée, mais pour Phó Thị Kim Đức, l’essentiel est là: la relève est assurée.