Iran : un accord sérieusement compromis

(VOVWORLD) - En affirmant que son pays détenait les « preuves concluantes » de l’existence d’un programme secret, destiné à permettre à l’Iran de se doter de l’arme atomique, le Premier ministre israélien a jeté de l’huile sur le feu. L’accord conclu en 2015 par la République islamique et le monde occidental est en effet sérieusement compromis, et il n’est pas sûr que l’intense ballet diplomatique auquel se livrent certains dirigeants européens depuis plusieurs jours suffisent à le remettre à flot.   
Iran : un accord sérieusement compromis - ảnh 1L'usine de production d'eau lourde d'Arak (centre) - Photo AP/TTXVN

Lundi 30 avril, en direct devant les télévisions israéliennes, le Premier ministre Benjamin Netanyahu a présenté « les copies exactes » de dizaines de milliers de documents qui sont, selon lui, autant de « preuves concluantes » de l’existence d’un programme secret mis en place par l’Iran, qui a aussitôt réfuté ces affirmations. 

Une déclaration qui survient à un moment sensible

Donald Trump a donné  jusqu’au 12 mai aux signataires européens de l’accord de 2015 - France, Royaume-Uni, Allemagne - pour en « réparer les affreuses erreurs ». Faute de quoi, il retirera les Etats-Unis de cet accord, connu sous l'acronyme JCPOA. C’est donc à moins de deux semaines de l’échéance fixée par le président américain que Tel Aviv a choisi de divulguer ces fameux documents, relatifs à un programme iranien appelé Amad, qui viserait à produire cinq têtes nucléaires. Benjamin Netanyahu n’a cependant pas été en mesure de   démontrer que la République islamique avait continué à vouloir se doter de la bombe atomique après 2015, le programme incriminé étant a priori antérieur à la conclusion de l’accord.  

Pour bien comprendre pourquoi Israël cherche à faire vaciller l’accord de 2015, il faut se souvenir que lorsque celui-ci avait été signé, Tel Aviv l’avait qualifié d’erreur historique. Pour l’Etat hébreu, il est parfaitement clair que la République islamique n’a nullement l’intention de renoncer à l’arme atomique et qu’elle constitue, de ce fait, une menace directe. 

Donald Trump, qui avait promis, lors de sa campagne électorale de déchirer cet accord une fois élu,  s'est contenté d'estimer que la déclaration de M. Netanyahu était une « bonne chose ». Le locataire de la Maison Blanche a également répété que l’accord sur le nucléaire iranien était « horrible pour les États-Unis ». Pour sa part, le nouveau secrétaire d'Etat américain Mike Pompeo a qualifié d'« authentiques » les documents présentés par Israël, sans pour autant dire si ces documents apportaient la preuve que Téhéran avait violé l'accord signé en juillet 2015.

L’UE au chevet de l’accord

De nombreux pays européens défendent l’accord signé avec Téhéran. La déclaration de Netanyahu en renforce « la pertinence », a ainsi déclaré la France. Quant à la cheffe de la diplomatie européenne Federica Mogherini, elle a estimé que ces affirmations ne remettaient pas en question le respect par Téhéran de l'accord de 2015. Même son de cloche du côté de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA), qui a confirmé n'avoir « aucune indication crédible d'activités en Iran liées au développement d'un engin nucléaire après 2009 ».

Tout récemment, le président français Emmanuel Macron et la chancelière allemande Angela Merkel se sont rendus aux Etats-Unis pour tenter de convaincre le président américain de préserver ce texte. Les dirigeants européens ont même proposé à Washington un accord élargi qui comprendrait les clauses de l’accord de 2015 et d’autres « piliers » concernant l'après-2025, date à laquelle doivent expirer certaines clauses concernant les activités nucléaires, mais aussi les missiles balistiques.     

De l’avis des observateurs, il paraît bien difficile de trouver « une faille qui permettrait de répondre aux préoccupations de Donald Trump tout en respectant le JCPOA ».

De son côté, Téhéran a déjà affirmé que l'accord n'était pas « renégociable », et a même menacé de reprendre l’enrichissement d’uranium dans l’éventualité d’un retrait américain.  

Considéré comme l’un des accords les plus complets et durables dans l’histoire de la dénucléarisation, le JCPOA risque aujourd’hui d’être tué et si c’est le cas, c’est la notion même de non-prolifération qui risque d’être mise à mal. 


Sur le même sujet

Commentaires

Autres