(VOVworld) - Le secrétaire d’Etat américain John Kerry vient d’effectuer une tournée de quatre jours en Asie centrale. C’est la première fois qu’un chef de la diplomatie américaine se rend ainsi dans toutes les anciennes républiques soviétiques de cette région. Si l’ambition des Etats-Unis d’accroître leur influence en Asie centrale est évidente, force est de constater qu’elle relève parfois de la gageure.
John Kerry arrive au Kirghizistan. Photo : Getty Image/AFP
Les cinq républiques d’Asie centrale que le secrétaire d’Etat américain a visitées sont le Tadjikistan, l’Ouzbékistan, le Kirghizistan, le Kazakhstan et le Turkménistan. Cette tournée a eu lieu suite à la mise en garde adressée par la Russie à propos d’une possible propagation des groupes islamistes armés d’Afghanistan dans toute la région. La situation est hors contrôle et différentes puissances étrangères tentent de profiter du chaos actuel pour accroître leur influence.
Priorité absolue : la coopération sécuritaire
Les Etats-Unis et les pays d’Asie centrale partagent des préoccupations communes, dont le combat contre l’organisation autoproclamée Etat islamique. Aussi les questions de sécurité et de lutte contre le terrorisme ont-elles occupé une place centrale dans les discussions qu’a menées John Kerry avec les dirigeants de la région. Au Tadjikistan, il a tenté de rassurer les pays d’Asie centrale face à l’émergence de l’extrémisme islamique qui s’est fait jour suite à la réduction de la présence militaire américaine dans la région. A Duschanbé, il a confirmé au président tadjik l’engagement des Etats-Unis à aider ce pays, le Tadjikistan donc, à protéger sa frontière avec l’Afghanistan et à résoudre ses problèmes économiques et sécuritaires.
A Astana, John Kerry a co-présidé le 4ème dialogue stratégique Etats-Unis-Kazakhstan. Dans la mesure où son PIB représente les deux tiers de celui de toute l’Asie centrale, où il dispose d’importances ressources naturelles et où il se situe au principal carrefour de la région, le Kazakhstan occupe une position géopolitique stratégique.
A l’occasion de cette tournée, les Etats-Unis et ces cinq pays d’Asie centrale ont proposé la création d’un nouveau cadre de relations multilatérales, appelé 5+1, qui pourrait exister parrallèlement aux relations bilatérales. Si cette initiative aboutit, les Etats-Unis auront une occasion en or pour rattraper, voire dépasser les autres partenaires extérieurs qui veulent aussi élargir leur influence dans la région.
Luttes d’influence
L’administration Obama est consciente qu’accroître son influence en Asie centrale n’est pas une mission facile. Vu sa position stratégique, cette région occupe une place essentielle sur le plan de la diplomatie internationale. Riches en pétrole et en gaz, les pays d’Asie centrale, qui sont aussi en première ligne pour ce qui est de la lutte contre le terrorisme, ont accueilli ces derniers temps de nombreux dirigeants du monde.
Pour les Etats-Unis, l’Asie centrale représente un enjeu sécuritaire important, notamment suite à leur retrait d’Afghanistan. De plus, les intérêts américains dans cette région pourraient aider Washington à asseoir son influence sur d’autres pays. Aussi, dès 1999, les Etats-Unis envisagaient-ils déjà de faire de l’Asie centrale une nouvelle « Route de la soie », un zone économique dynamique reliant l’Afghanistan, les pays d’Asie centrale et d’Asie du Sud. En envoyant, en 2001, leurs troupes en Afghanistan et par la suite, au Kirghizistan, les Etats-Unis avaient confirmé leur souhait de jouer un rôle important dans la région. Cependant, leur plan semble avoir échoué. Ils se voient obligés de se retirer progressivement d’un Afghanistan qui plonge chaque jour un peu plus dans le chaos. Déjà, les troupes américaines se sont aussi retirées de la base Manas, au Kirghizistan.
Dans ce contexte, d’autres puissances ont en revanche renforcé leur présence. La Russie aide le Tadjikistan à défendre sa frontière en maintenant ses bases militaires dans ce pays mais aussi au Kirghizistan voisin. Ces deux pays font d’ailleurs partie de l’Organisation de coopération de Shanghai et de l’Organisation du traité de sécurité collective, dans lesquelles la Russie joue un rôle primordial. C’est pourquoi il est fort à parier que l’influence russe dans la région ne pourra que se renforcer chaque jour davantage. Le Japon ne veut pas non plus rester en dehors. Tout récemment, le Premier ministre Shinzo Abe a lui aussi effectué une tournée dans les cinq pays d’Asie centrale, tournée dont le but était d’intensifier la coopération économique.
En tout cas, par la tournée du secrétaire d’Etat John Kerry en Asie centrale, les Etats-Unis ont voulu prouver qu’ils pouvaient maintenir une présence à la fois politique et militaire dans la région. Mais pour vraiment réaliser leur ambition, ils auraient besoin d’un concours de circonstances exceptionnels, et force est de constater qu’ils n’ont pas tous les leviers en main, loin s’en faut.