Syrie : Une décision dangereuse

(VOVworld) - La crise politique en Syrie vient de connaître un nouveau rebondissement, suite à la décision de la Ligue Arabe de ne plus accorder de reconnaissance officielle au gouvernement du Président Bachar al-Assad. La Syrie est donc désormais représentée auprès de la Ligue par les forces de l’opposition : de quoi attiser un peu plus la violence dans ce pays qui n’en avait pourtant pas besoin.

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Réunion des ministres des Affaires étrangères de la Ligue arabe.
Source : Abdeljalil Bounhar/AP/SIPA

Le sommet annuel de la Ligue Arabe s’est clôturé ce mardi à Doha, la capitale du Qatar, avec notamment « l'octroi à la coalition nationale de l'opposition syrienne du siège de la république arabe de Syrie, à la Ligue Arabe, et dans les organisations et conseils qui en dépendent, et ce, jusqu'à l'organisation d'élections et la formation d'un gouvernement ». La résolution, approuvée par les 15 pays membres de la Ligue souligne, je cite : « Chaque Etat membre a le droit d'apporter, selon sa volonté, tous les moyens, y compris militaire, pour soutenir la résistance du peuple syrien et de l'armée syrienne libre ». Parallèlement, la Ligue Arabe presse les organisations régionales et internationales de reconnaître la coalition nationale syrienne (CNS) en tant que représentant légal unique du peuple syrien. Il s’agit là d’un tournant dangereux. Tel quel, la Ligue Arabe ne fait que jeter de l’huile sur le feu.    

Cette prise de position a d’ailleurs  été immédiatement et vivement critiquée par la communauté internationale. Mercredi, la Russie l’a qualifiée d’illégale et d’injustifiée. Le même jour, Damas a accusé la Ligue Arabe d’avoir légitimisé le terrorisme en octroyant la représentation syrienne à la coalition nationale syrienne.   Selon un sondage effectué par la compagnie d’études de marché YouGov, la plupart des Américains et des Britanniques sont jusqu’à présent hostiles à l’idée d’approvisionner en armes les insurgés syriens ou d’envoyer des troupes sur le terrain. Sur plus d’un millier d’Américains interrogés en ligne, 45% se déclarent opposés à l’armement de l’opposition syrienne alors que seulement 16% d’entre eux soutiennent cette idée. Le taux de Britanniques protestataires est encore plus élevé : 57% des 3.600 interviewés. C’est donc un avertissement au Premier Ministre britannique David Cameron, qui, la semaine dernière, avec le Président français François Hollande, avait appelé l’Union Européenne à lever l’interdiction de ventes d’armes appliquée à la Syrie, en vue de fournir des munitions aux forces de l’opposition.

Face à cette décision de la Ligue Arabe et aux visées occidentales, l’opinion internationale redoute qu’un scénario similaire à celui qui s’est déroulé en Libye ne se répète en Syrie. Le départ du Président syrien Bachar al-Assad est considéré comme inéluctable. La question est plutôt de savoir comment se produira le transfert du pouvoir. En réalité, vu les différends entre les différentes factions qui constituent l’opposition, personne ne peut prévoir quelle sera l’évolution de la situation après l’écroulement de l’actuel gouvernement de Damas. Samedi dernier, à Istanbul en Turquie, la CNS a élu Ghassan Hitto au poste de Premier Ministre par intérim, pour avoir la main mise sur les zones contrôlées par les insurgés. Mais cette élection n’a pas fait que des heureux. Ghassan Hitto est en effet un Américain né en Syrie et soutenu par les forces étrangères, dont il semble être l’homme de main. Certaines personnalités de l’opposition syrienne ont d’ailleurs boycotté cette élection à Istanbul pour manifester leur désapprobation. Qui plus est, alors que le tout nouveau Premier Ministre par intérim envisage d’utiliser l’armée syrienne libre pour consolider son pouvoir, il doit déjà faire face à des critiques au sein-même de l’opposition syrienne qui lui reproche de vivre en Turquie, à l’écart des combats, donc. De son côté, la CNS a de plus en plus de peine à maintenir un semblant de cohésion au sein des insurgés, lesquels lui réclament des armes qu’elle n’est pas toujours en mesure de fournir.    

La Syrie est donc toujours dans l’impasse. Mercredi, dans une lettre envoyée à la conférence des dirigeants du BRICS - une organisation regroupant cinq pays: Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud -, le Président Bachar al-Assad a demandé à ces pays de se coordonner afin d’empêcher la violence en Syrie et d’aider à la réussite des solutions politiques. Auparavant, le Secrétaire général de l’ONU Ban Ki-Moon avait lancé une mise en garde aux dirigeants du monde entier, face à la menace d’un anéantissement total de la Syrie, qui en est à la 3ème année d’un conflit particulièrement dévastateur, puisqu’il a déjà coûté la vie à 70.000 personnes et obligé 3 millions d’autres à prendre le chemin de l’exode.  

L’espoir semble s’amenuiser chaque jour davantage en Syrie, à mesure que ceux qui sont pressés d’en découdre font entendre leur voix de plus en plus fort.

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