(VOVworld) - Yên Châu est un district de la province montagneuse de Son La, au nord, qui attire autant par ses bananes et ses mangues délicieuses que par la flûte khèn bè des Thai, une ethnie résolument mélomane.
Autrefois, le khèn bè était l’instrument galant des garçons Thai de Yên Châu. Bien des histoires amoureuses ont vu le jour au son de la flûte. Aujourd’hui, cet instrument est toujours utilisé mais il n’est plus le seul. Les Thai ont en effet adopté des instruments de musique traditionnels d’autres ethnies: tambour, gong, flûte, viole à deux cordes... Néanmoins, le khèn bè continue de jouer un rôle prépondérant dans les festivités populaires. Le maître artisan Lừ Hồng Xưa est l’un des rares à savoir à la fois fabriquer et jouer cet instrument:
«Ce qui distingue les Thai de Yên Châu des autres contrées, c’est leur capacité à jouer du khèn bè. Lors des fêtes, des rassemblements, on en joue pour créer de l’ambiance et parfois pour accompagner les chants alternés. C’est un instrument indissociable de la vie culturelle des Thái d’ici.»
A Yên Châu, chaque maître de khèn bè invente ses propres mélodies et ses propres rythmes. Aux instrumentistes de les apprendre et de les interpréter. Lừ Văn Bánh joue du khèn bè depuis qu’il est tout petit:
«J’aime beaucoup le khèn bè de Yên Châu. J’ai 67 ans maintenant, et je continue à en jouer lors des fêtes et des concours ou pendant les pauses au travail. J’ai même été filmé par la télévision nationale.»
Chaque khèn bè est en soi une oeuvre d’art. Sa fabrication nécessite une grande finesse et beaucoup de minuties, depuis le choix des tubes de tambou jusqu’à l’assemblage, en passant par le percement. Lư Hồng Xưa, facteur de flûte:
«Tous les bambous ne sont pas utilisables dans la fabrication du khèn bè de Yên Châu. Le seul valable est le mạy pao, un bambou qui ne pousse qu’en forêt. On choisit les troncs qui poussent là où il y a beaucoup de soleil, car ceux qui poussent à l’ombre ne supporteront pas le soleil lorsqu’on les fera sécher. Le séchage au soleil prend un mois. Après, on coupe le tronc de bambou en morceaux. Le réservoir est fait avec du bois mạy mụ, un bois souple qui ne se craquelle pas. L’anche est en cuivre ou en argent blanc, et n’a la taille que d’un cheveu. Il faut compter un jour pour fabriquer un khèn bè.»
Malgré tous les affres de la vie moderne, le khèn bè continue de rythmer la vie des Thai de Yên Châu, dans la joie comme dans le chagrin./.