Nicolas Ancion: « J’écris comme un enfant qui joue »

(VOVworld)- Qu’entendez-vous par « marathon d’écriture »? C’est une course de neurones durant laquelle votre cerveau devra courir contre le temps pour finir un roman en 24h. Qui veut se lancer dans une telle torture? Bah… Nicolas Ancion. Bruxelles, 2010. New York, 2013. Hanoi et Ho Chi Minh-ville, 2014. Cet écrivain belge a réussi, non pas une, mais trois fois à réaliser un roman en 24h. Phuong Nguyen vous invite à faire connaissance à cet Usain Bolt de la littérature.


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Nicolas Ancion (Photo: Dominique Houcmant)

Imaginez que vous passez toute une journée dans des conditions pour le moins spartiates : rester assis tout le temps, sans presque manger ou dormir, la tête en ébullition, et sans parler des crampes aux doigts, aux bras et aux jambes qui sont le lot de toutes ces heures d’immobilité forcée… Mais dites-moi, Nicolas Ancion, pourquoi vous vous torturez?

« Parce que je suis paresseux. Et si je n’ai pas une échéance, une date à laquelle je dois terminer un texte, je me dis : “Oh je terminerai demain” et puis des mois passent et je ne finis pas ce que j’ai envie d’écrire. Tandis que quand je me mets dans un défi comme celui-là, j’annonce à tout le monde que je vais écrire un roman en 24h, je le fais. Écrire en général, on le fait au calme, sans s’énerver. Mais quand on s’énerve, on a l’adrénaline qui coule dans le sang, et c’est très bon pour la concentration, pour l’efficacité. Et donc je me suis rendu compte que quand on écrit comme ça, je peux en tous cas produire beaucoup, écrire beaucoup. Et donc voilà, en français on dit : “donner un coup de pied aux fesses”, et le marathon, c’est mon “coup de pied aux fesses” pour que j’écrive. »

Eh oui, c’est de la vieille histoire. Le délai, l’adrénaline, du café… Mais ces ingrédients qui semblent parfaits pour une bonne œuvre peuvent tout de même nous plonger dans la panique, surtout quand on se trouve aux portes du territoire de la « Page Blanche ». 

« Il y a beaucoup de choses à faire dans la vie. Il y a plein de trucs, faire une sieste, jouer un jeu vidéo… si je n’ai pas d’idée, si je n’ai pas envie d’écrire, je vais faire autre chose. Quand j’écris, c’est parce que j’ai quelque chose dans ma tête, que j’ai envie de sortir de ma tête. Ecrire, ça me sert à ça, me libérer l’esprit. Et donc je n’écris pas sauf si je sais au moins une phrase. Un texte, j’ai toujours la première phrase dans la tête au moment où je commence à l’écrire. Ça vient dans les minutes. »

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Nicolas Ancion en plein marathon d’écriture à Hanoi, avec les deux traductrices qui font la traduction instantanée
Photo: VOV/Phuong Nguyen

Ecrire pour se libérer l’esprit. Si vous l’aviez vu en plein marathon d’écriture... Ordinateur portable devant lui, les écouteurs aux oreilles, assis à côté d’une grande fenêtre de l’Espace par une matinée ensoleillée, l’air dégagé, comme s’il n’était pas en plein marathon d’écriture… Mais voilà, il faut croire que la recette est une recette-miracle… Les personnages apparaissent, les idées s’enchaînent…

« Mais tous les enfants font ça, tous les enfants quand ils jouent avec une poupée, avec un bout de bois, avec une petite voiture, ils inventent une histoire. Personne ne se met d’abord, il n’y a pas d’enfant qui se dit “je vais réfléchir, à quoi je vais jouer cet après-midi ». Il commence à jouer. Et si on les laissent jouer, ils jouent trois heures, quatre heures, cinq heures. Et puis on leur dit “A table”, et qu’est-ce qu’ils font? Ils descendent, ils vont manger. Le jeu s’est arrêté. J’écris comme ça. J’écris comme les enfants jouent. Tout le monde peut le faire quand il est petit, et puis on n’y arrive plus après parce qu’on croit savoir ce que c’est la littérature, on croit savoir que c’est des choses compliquées, qu’on doit réfléchir. Et moi je crois que dans des choses très spontanées qui sortent, il y a aussi des choses très profondes. »

24h pour une création littéraire. Nicolas Ancion y est arrivé, pas une, mais trois fois, dans trois continents différents. Reste à se demander quel sera son prochain défi?

« On m’a proposé d’aller à Berlin. Il y a une ligne de métro qui fait le tour de la ville. Et donc on m’a proposé d’écrire à bord du métro, pendant 24h, avec deux autres écrivains, un Allemand et un Français. Et je n’ai jamais réussi à travailler avec un autre écrivain. J’ai déjà essayé, on n’y est pas arrivé. Donc le travail à trois, dans ce défi-ci, c’est beaucoup plus compliqué. Et on va voir… Peut-être ça ne donnera rien, on n’écrira pas un même texte. On essaiera quand-même que nos textes aient des éléments communs. J’espère que ce va se faire en 2015. Ce que je sais, c’est que la ligne de métro, elle forme une tête de chien, si on regarde sur la carte, ça forme une tête de chien. Et ça donne envie de raconter une histoire, voilà. »

Chers auditeurs, si jamais vous croisez Nicolas Ancion quelque part, faîtes attention! Vous pourriez devenir son prochain personnage dans son prochain marathon. Quant à tous ceux qui souhaitent se mettre sur la piste d’un marathon d’écriture, “il faut le faire si on a envie. C’est quoi ? On aura passé une journée à ça, c’est rien une journée dans une vie”, nous conseille Nicolas Ancion.


De retour au Vietnam fin septembre pour fêter la sortie de la version en vietnamien de son roman “Quatrième étage”, Nicolas Ancion a achevé son troisième marathon en deux fois 12h à Hanoi et Ho Chi Minh-ville, intitulé “Un léger vent de panique”.
Vous pouvez lire le texte intégral ici:
http://ancion.hautetfort.com/archive/2014/09/24/vingt-quatre-heures-c-est-deux-fois-douze-heures-5454174.html
La traduction vietnamienne simultanée est ici:
https://sites.google.com/site/ecriture24/traduction


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