(VOVWORLD) - Les Tày et les Nùng, deux communautés ethniques culturellement très proches vivant essentiellement dans le Nord du Vietnam, ont une vie spirituelle marquée par les rites liés au then. Dans leur langue, then signifie plusieurs choses: soit une personne qui sert d’intermédiaire entre le monde terrestre, le monde des morts et les divinités célestes, soit le spectacle de chant et de danse lié à des rites, soit le chant lui-même.
Intéressons-nous tout d’abord au then en tant que chaman, un élément indispensable à la vie spirituelle des Tày et des Nùng, qui font appel à lui à toutes les occasions importantes, comme nous l’indique Dam Thi Sinh, une Tày de la province de Cao Bang.
«Chaque année, au premier mois lunaire, nous faisons appel à un then pour conduire une cérémonie visant à éloigner les malchances et à nous attirer santé, facilité dans les affaires et récoltes abondantes... Nous organisons également une autre cérémonie en l’honneur de la déesse qui veille sur les enfants. C’est une tradition qui nous tient beaucoup à cœur», dit-elle.
Selon la croyance des Tày et des Nùng, le then serait capable de communiquer avec les morts et les divinités célestes et donc de transmettre à ces derniers les vœux des vivants qui souhaitent recevoir leur bénédiction. Son voyage vers les autres mondes démarre lorsque le then chante en jouant de son luth bicorde. En fonction des finalités de chaque cérémonie, c’est le then lui-même qui choisit les offrandes à présenter et les prières appropriées. Nguyên Van Tho est un jeune then de la province de Lang Son.
«Être then signifie oeuvrer toute sa vie pour le bien des autres. Depuis leur naissance jusqu’à leur mort, les Tày et les Nùng fidèles à la tradition font systématiquement appel au then lorsqu’ils tombent gravement malades ou traversent une période particulièrement difficile», explique-t-il.
Les cérémonies conduites par les then nous apprennent beaucoup sur les longues traditions culturelles des Tày et des Nùng, que ce soient le respect des seniors, l’amour des enfants, ou la solidarité entre les villageois.
Le chaman conduit une cérémonie pour fêter le premier mois d’un nouveau-né. Photo: VOV |
Mais en plus du côté spirituel, les spectacles de then sont un trésor littéraire et artistique qui est jalousement préservé dans la vie culturelle, et amoureuse aussi, de ces deux peuples, comme le fait remarquer Dang Hoành Loan, l’ancien directeur adjoint de l’Institut de musicologie, relevant de l’Académie de musique nationale du Vietnam.
«Force est de constater que bien des peuples conservent une forte vie spirituelle. Cela est particulièrement vrai chez les Tày et les Nùng qui semblent trouver toutes les réponses à leurs questions spirituelles dans le then. Dans tous les sens du terme, le then n’a pas disparu et je suis persuadé qu’il ne disparaîtra jamais», affirme-t-il.
Les spectacles de then sont un condensé de littérature, de musique, de danse et de beaux-arts. La croyance dans les then, elle, qui rappelle les religions dites primitives, a survécu à tous les affres du temps. Son secret tient sans doute au fait qu’elle fait ressentir à chaque pratiquant la présence d’un monde sacré, mythique et proche à la fois, qui est aussi éternel que l’âme et l’identité d’un peuple.