Les noces des Giay

(VOVworld) - Perpétuer l’espèce est un souci majeur pour les Giay. Aussi accordent-ils une importance capitale au mariage, dans lequel chaque lignée veut voir un gage de pérennité.  

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Photo : internet


Chez les Giay, on ne badine pas avec l’autorité parentale ! Ce sont les parents qui décident de tout, y compris lorsqu’il s’agit de choisir un conjoint à leur rejeton. « Pas de discussion, c’est comme ça, tu l’épouseras, un point c’est tout ! »... Qui osera encore prétendre que les traditions se perdent ? 

Imaginons je suis un jeune Giay. Je m’en remets donc au choix, forcément éclairé, de mes géniteurs, lesquels se seront fait un devoir de me chercher l’épouse idéale dans le voisinage, « idéale » étant ici synonyme de « douce et soumise » !... Bref, me voilà pourvu et pris et dépourvu : pourvu d’une fiancée et même d’une belle-mère - je n’en demandais pas tant ! - et pris au dépourvu par toutes ces attentions parentales. Et l’amour, dans tout ça ? Inutile de s’inquiéter, ils - mes chers parents bien sûr ! - auront pensé à tout, et même à organiser ces rencontres douces et romantiques, avec chants alternés à l’appui, où je n’en mène pas large, pas plus d’ailleurs que ma dulcinée que je soupçonne de se demander, à chaque fois qu’elle me regarde, si vraiment, elle avait mérité ça !... San Chang, un Giay du hameau de Ta Van :

« Si le couple se connaît bien avant, ce n’est pas nécessaire d’organiser des rencontres de ce genre. Si ce n’est pas le cas, en revanche, c’est indispensable. Ça permet au jeune homme de voir à quoi ressemble sa future épouse, et à celle-ci de découvrir sa belle-famille. On compare ensuite les horoscopes pour s’assurer qu’il puisse y avoir une bonne concordance. Et si tout va bien, on passe directement aux fiançailles, sans autre forme de procès. »  

« Sans autre forme de procès »... Il m’est d’avis que plus d’une jeune Giay doit se demander dans quelle galère elle va se retrouver. Mais comme il n’est pas question de leur demander leur avis, faisons comme si, et passons donc aux fiançailles proprement dites. Lorsqu’arrive ce jour faste et auréolé de bonheur, le clan du jeune homme se rend chez celui de la jeune fille en apportant les indispensables cadeaux :  un coq et une poule, un canard et une cane, mais aussi un jeune cochon d’une quarantaine de kilos. Autant dire qu’à ce jeu-là, les fils de fermiers passent  pour être des princes !... A table - pas d’épousaille sans ripaille !... - , les deux familles décident du jour du mariage. Ce sera entre le 10ème et le 2ème mois lunaire, c’est-à-dire à l’intersaison agricole, ce qui est tout de même bien pratique !  

La tradition veut que le jeune homme offre des cadeaux fastueux au clan de sa promise. Il doit tout d’abord offrir un banquet pantagruélique aux invités, banquet qui ne sera digne de ce nom que s’il confine à l’orgie. Mais il doit aussi offrir des bijoux et des vêtements à sa belle et des hottes remplies de riz à ses beaux parents.

Voici enfin venu le jour tant attendu ! Un convoi, conduit par deux hommes et deux femmes d’âge mur, arrive chez la jeune mariée pour l’accompagner chez son époux. La délégation se compose aussi d’un garçon d’honneur, de deux demoiselles d’honneur, et des porteurs de cadeaux. San Chang, encore :

« Ce jour là, on érige deux portiques chez la jeune fille. En face de chacun de ces portiques, on dresse des tables, recouvertes de gobelets d’alcool que les deux familles se font un plaisir de vider en échangeant des chants alternés. Le jeune marié va ensuite offrir des enveloppes rouges aux proches de son épouse. »

Le jeune couple va rendre hommage aux ancêtres de la mariée avant de s’en repartir. Mais c’est là que ça se complique. 

« Le jeune marié doit faire en sorte d’enlever sa jeune épouse des bras de ses proches, lesquels font tout pour la retenir ! C’est la tradition après tout ! »

Au niveau des costumes de mariage, il n’y a pas beaucoup de différence par rapports au quotidien. Vàng Thi Non, une autochtone :

« La jeune mariée apporte avec elle ses affaires ce jour-là. Ses vêtements de mariage sont très simples : une chemise verte, une coiffe, un voile rouge et des chaussures. Et lorsqu’elle arrive chez ses beaux-parents, elle doit revêtir une chemise noire. »  

Avant de franchir le seuil de sa future maison, la jeune mariée porte devant sa poitrine un petit miroir, symbole de pûreté, des gousses d’oignons et d’ails, signe de fécondité, ainsi qu’un coq, animal sacré capable de chasser les âmes maléfiques. Hoàng Van Ngan, un Giay de Lao Cai :

« La jeune mariée arrive dans sa nouvelle maison en pleine nuit, à une heure où les fantômes déambulent partout. Elle doit donc apporter des talismans pour écarter la malchance. A l’extérieur, on installe un escalier de trois marches recouvert d’une étoffe rouge que le jeune couple doit emprunter pour pénétrer dans la demeure familiale. »  

Comme quoi ! Chez les Giay aussi, on sait dérouler le tapis rouge dans les grandes occasions. Les festivaliers cannois n’ont rien inventé !

Voilà donc notre jeune couple presque installé à demeure. Il reste à la jeune marié  à demander aux ancêtres de son mari de la reconnaître comme un membre du clan à part entière. Après-quoi, sa belle-mère l’accompagne pour lui faire visiter son nouveau foyer, sans omettre bien sûr de lui montrer avec une bienveillante insistance où se trouvent les ustensiles ménagers. On ne sait jamais, des fois que !... 

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