(VOVWORLD) - «A Kinshasa, il n’y avait pas de joie dans l’éclat du soleil»… Il y a en tout cas Phan et Pha Le, dont les amours épousent les méandres du fleuve Congo, et dont le lecteur suit les errances au rythme d’une ville envoûtante, qui déroule son lot de misère et de tragédies quotidiennes sous la plume de Quynh Le.
L’essentiel de l’histoire se passe à Kinshasa, la capitale de la République du Congo, que Quynh Le s’emploie à décrire avec précision tout au long des 200 pages de son roman. Elle nous décrit non seulement la vie des Congolais mais aussi celle des expatriés vivant à Kinshasa, et qui pour le coup, viennent des quatre coins du monde. Le Congo… Un pays synonyme de pauvreté, de maladie, de violence... Mais qui conserve son identité, contre vents et marées. Cette identité, c’est surtout par la musique qu’elle se manifeste: cette rumba congolaise que les noirs font résonner à toute heure du jour et de la nuit, le plus souvent avec des moyens de fortune. Des bols, des baguettes, la surface d’une table… Tout ce qui peut créer un son et transcender un quotidien souvent misérable…
«Je suis une sorte d'amante infidèle des villes. Quand je vis dans une ville, je pense à une autre. Quand je vivais à Kinshasa, je pensais souvent à Hanoi. Et au début de mon séjour à Lausanne, c’était Kinshasa qui me manquait. L'odeur de la citronnelle, la couleur éblouissante des flamboyants sur la rive, les musiciens handicapés dans les rues poussiéreuses chantant la «Rumba Congolaise», les Shégués, ces enfants abandonnés dans les rues mais qui dansent malgré tout... De nos jours, avec le temps, il ne reste plus que de beaux souvenirs. Mais c'est une vie difficile pour les Congolais à Kinshasa. La pauvreté, la faim, les problèmes de santé liés au paludisme et le risque de guerre civile... Les gens sont pauvres et ont peu d'espoir. Je n'ai pas écrit ce livre comme une histoire d'amour mais comme un conte sur Kinshasa, une ville qui a tant de choses à raconter.» dit Quynh Le.
Avant d’arriver au Congo, Phan et Pha Le, les deux protagonistes du livre, ont chacun de leur côté vécu une histoire d’amour plus ou moins douloureuse. Lui a décidé de quitter son pays natal pour Kinshasa, en espérant ainsi oublier Yoko. Quant à elle, elle est partie au Congo pour s’éloigner du Vietnam, c’est vrai, mais aussi pour tenter de comprendre ce qui est arrivé à son père, mort là-bas.
«Pha Le veut aller au Congo pour tenter de découvrir la vérité qui se cache derrière la mort de son père. Elle veut comprendre ce qui est arrivé à son père au Congo, un père qui aimait tellement sa fille qu’il l’a appelée Pha Le, pureté et beauté… Mais pour Pha Le, ce voyage va lui permettre de se découvrir elle-même et d’en finir avec les démons du passé, de faire la paix avec eux…», raconte Quynh Le.
Quynh Le au Congo |
Le combat quotidien que livrent les Congolais contre la misère sert de toile de fond à l’histoire d’amour de Phan et Le, et le lecteur découvre ainsi des personnages attachants, dont la vie est d’une insondable précarité. Il y a Rémy, un enfant sans abri qui doit chaque jour traîner dans les rues pour demander l’aumône des passagers, Marie qui doit travailler comme une forcenée alors qu’elle est enceinte, ce qu’elle s’efforce de cacher, de peur de perdre son gagne-pain… Et puis tous les autres, la foule des anonymes qui risquent leur vie à chaque pas dans cette ville où les tireurs isolés font la loi…
«A Kinshasa, tout peut arriver. Il y a toujours des choses inattendues. au Congo. Moi, j’ai été journaliste, alors je suis fascinée par les événements historiques et je privilégie les faits. Quand ma fille (qui avait un an à l'époque) et moi avons été évacués de notre maison par des chars de l'ONU pendant les évènements sanglants de mars 2007, les casques bleus ont refusé d'emmener notre cuisinier parce qu'ils devaient sauver des femmes et des enfants en priorité. Heureusement, rien ne lui est arrivé mais cette éruption de violence a entraîné la mort de nombreux civil: entre 300 et 600 victimes. La mort n'est pas une fiction mais une réalité presque banale là-bas.», se souvient Quynh Le.
L’histoire débute à Kinshasa lors des premiers jours du printemps 2007 et s’achève à la clôture de la saison, en France, dans le Finistère, où Phan a passé une grande partie de son enfance. Quant à Lê, elle reste seule sur son chemin, «Elle vient de perdre la joie qu’elle avait trouvé sous l’éclat du soleil»…