(VOVWORLD) - Les élections européennes de 2024, qui se sont déroulées du 6 au 9 juin, ont été marquées par une montée significative de l'extrême droite. Cette tendance pourrait avoir un impact majeur sur de nombreuses politiques clés de l'Union européenne, tout en redéfinissant l'équilibre des pouvoirs au sein de plusieurs États membres.
Environ 51 % des quelque 360 millions d'électeurs appelés aux urnes ont participé à ce scrutin européen, enregistrant ainsi le taux de participation le plus élevé des 20 dernières années.
La victoire des partis de droite
Selon les résultats provisoires annoncés ce mardi 11 juin par le Parlement européen, la "grande coalition" centriste, composée du Parti populaire européen (PPE), des sociaux-démocrates (S&D) et des centristes (Renew Europe), devrait maintenir sa majorité avec un total de 401 sièges sur 720 au Parlement européen. Cette coalition dépasserait ainsi la majorité requise pour jouer un rôle de premier plan au Parlement européen et aurait le droit de décider du prochain président de la Commission européenne. En revanche, les Verts, qui avaient remporté une victoire considérable lors des élections de 2019, connaîtraient une chute, obtenant seulement 53 sièges, contre plus de 70 actuellement.
Le président français Emmanuel Macron est allé voter le 9 juin 2024, lors des élections européennes. Photo: AFP |
Cependant, ce scrutin est surtout marqué par une montée en puissance des partis d'extrême droite, en particulier dans les deux principales puissances de l'UE, la France et l'Allemagne. En France, le Rassemblement national, dirigé par Jordan Bardella, a largement dominé le scrutin avec plus de 31 % des voix, reléguant ainsi le parti Renaissance du président Macron à une seconde place avec seulement 15,1%. En Allemagne, le parti d'extrême droite AfD a pris la deuxième place, juste devant les sociaux-démocrates du chancelier Olaf Scholz. Dans plusieurs autres pays tels que l'Autriche, l'Espagne, l'Italie, la Belgique, et les Pays-Bas, l'extrême droite est également en nette progression. Bien que la montée de la droite, en particulier des partis d'extrême droite et populistes, ait été anticipée, les résultats de ce scrutin restent choquants.
Le nouvel équilibre des pouvoirs au sein du Parlement européen pourrait avoir un impact majeur sur de nombreuses politiques clés du bloc, comme l'a souligné Corina Stratulat, experte du Centre de recherche sur les politiques européennes.
"L'environnement sera un secteur vulnérable. En outre, étant donné la structure actuelle du Parlement européen, je pense que les domaines liés à la réforme institutionnelle, à l'expansion de l'UE et même au secteur de la défense pourraient également être affectés", a-t-elle dit.
Partageant ce point de vue, de nombreux experts estiment que la forte polarisation et la montée des partis d'extrême droite obligeront la majorité (PPE, RE, S&D) à s'appuyer davantage sur l'extrême droite pour adopter certaines réformes importantes.
Selon Armida van Rij, experte à l'Institut royal des affaires internationales Chatham House, la montée en puissance des partis d'extrême droite aura un impact négatif sur la politique européenne en matière d'immigration. Cela pourrait contraindre la Commission européenne à abandonner ou à retarder certaines réformes récemment adoptées, telles que le renforcement du contrôle de sécurité aux frontières et la mise en place d'un mécanisme d'attribution obligatoire des réfugiés.
Le Pacte vert de l'UE est également menacé, car le Parlement européen pourrait retarder l'adoption d'importants accords climatiques et assouplir de nombreuses réglementations en matière de protection de l'environnement dans le secteur agricole, comme cela a été le cas en avril dernier face à une vague de protestations des agriculteurs à travers l'Europe.
De plus, le plan de l'Europe visant à interdire totalement la vente de voitures et de camions à combustion interne à partir de 2035 pourrait être remis en question, tandis que les investissements dans les énergies renouvelables pourraient être réduits au profit de sources d'énergie moins coûteuses telles que le pétrole ou l'énergie nucléaire.
En ce qui concerne la défense et la sécurité, de nombreux partis d'extrême droite en Europe s'opposent à l'augmentation des dépenses militaires, ce qui pourrait compromettre l'ambition de l'UE de créer un fonds de défense commun ou de renforcer le soutien à l'Ukraine.
Un séisme français
En plus des répercussions à long terme sur de nombreuses politiques majeures de l'UE, les élections européennes de 2024 ont également un impact significatif sur la scène politique de plusieurs États membres, en particulier la France. Le président Emmanuel Macron a annoncé le dimanche 9 juin la dissolution de l'Assemblée nationale à la suite des élections européennes marquées par la victoire du Rassemblement national et la défaite de son propre camp. Il a également convoqué des élections législatives anticipées, une première depuis 1997. Ce nouveau scrutin se déroulera en deux tours, les 30 juin et 7 juillet.
Emmanuel Macron a exprimé sa "confiance en la capacité du peuple français à faire le choix le plus judicieux" lors des élections anticipées. Cependant, de nombreux experts estiment que le président français a pris un risque considérable, car à l'heure actuelle, le Rassemblement National semble être en bonne position pour remporter les élections législatives en France.
"Cette décision ouvre une période d'incertitude réelle dans les trois prochaines semaines où les électeurs français seront contraints de faire un autre choix. Cette décision est également très risquée car elle donne l'opportunité à l'extrême droite de gouverner le pays pour la première fois", a souligné Anne Muxel, directrice du Centre de recherches politiques de l'Institut d'études politiques de Paris (Sciences Po Paris).
Les élections européennes ont également un impact significatif sur d'autres pays européens. En Belgique, après sa défaite aux élections européennes et fédérales, le Premier ministre belge Alexander De Croo a annoncé sa démission le 10 juin. En Allemagne, le gouvernement de coalition au pouvoir (SPD, Parti vert, FDP) sera également affaibli suite à sa défaite aux élections européennes.