(VOVWORLD) - Ils étaient venus partager leur savoir, ils sont repartis le cœur bouleversé. Dominique et Isabelle Luneau, professeurs de chimie venus de France, ont prolongé leur mission pour découvrir le Vietnam autrement — celui du quotidien, de la solidarité, et de la lumière qui persiste même sous la pluie. À Hué, en pleine inondation, ils ont vu un peuple debout dans l’adversité, souriant malgré la tourmente.
Dominique et Isabelle Luneau à Hué. Photo fournie par DL |
Dominique Luneau: Nous avons passé quelques jours dans une Hanoï incroyablement trépidante, puis en immersion dans le paysage somptueux de la baie de Lan Ha. Nous avions choisi une croisière de trois jours et deux nuits — un excellent choix pour apprécier la beauté des lieux sans se presser. Après Hué, nous sommes arrivés à Hôi An, également touchée par les inondations. Nous sommes plutôt de nature optimiste et n’avons pas souhaité changer nos plans. Ou peut-être, tout simplement, nous n’imaginions pas ce qu’est réellement une ville inondée ! Par notre présence, nous espérions aussi montrer notre solidarité avec les habitants de ces villes sinistrées — dire que, même dans la tourmente, on ne détourne pas le regard.
VOVworld: Vous êtes venus au Vietnam uniquement pour voyager, ou y avait-il une autre raison?
Dominique Luneau: Je suis professeur à l’Université Claude-Bernard Lyon 1 et mon épouse Isabelle enseigne à l’Université Grenoble Alpes. Nous sommes tous deux chimistes. Je suis venu au Vietnam pour participer à la 10ᵉ Conférence asiatique de chimie de coordination, un événement annuel organisé successivement dans différents pays d’Asie et d’Océanie. Cette année, la conférence se tenait à l’Université nationale du Vietnam à Hanoï, du 23 au 26 octobre.
Dominique Luneau. Photo fournie par DL |
VOVworld: Et avec votre regard d’expert, comment percevez-vous le dynamisme et la curiosité intellectuelle du Vietnam aujourd’hui?
Dominique Luneau: Les universitaires vietnamiens sont devenus très actifs dans ce domaine de la chimie, qui s’intéresse aux composés associant métaux et molécules organiques, allant des sciences de la vie aux matériaux. Il y avait environ 500 participants venus principalement d’Asie, mais aussi d’autres régions du monde. Je suis venu avec mon doctorant, qui s’est fait de nombreux amis parmi les étudiants vietnamiens. Ils lui ont fait découvrir Hanoï après la conférence — il en est revenu enchanté.
Une rue après le passage des crues. Photo fournie par DL |
VOVworld: Après votre mission, vous avez réservé une semaine pour visiter le Vietnam, notamment le Centre. Or, ce séjour a coïncidé avec les inondations les plus graves à Hué et à Hôi An. Pouvez-vous partager quelques souvenirs de cette expérience?
Dominique Luneau: Avec ma femme Isabelle, nous sommes arrivés à Hué un mercredi soir, au plus fort des inondations. De nombreuses routes étaient coupées, y compris celle menant à notre hôtel, situé près de la rivière. Nous avons attendu un moment, comme beaucoup d’habitants, avec une certaine résignation. Puis nous avons finalement pu rejoindre notre hôtel à bord d’un camion de remorquage.
Dès notre arrivée, nous nous sommes sentis proches des habitants. Devant cette catastrophe, je n’ai perçu ni colère ni découragement, mais plutôt beaucoup de chaleur humaine, d’attention et d’entraide. Nous avons été admirablement accompagnés par l’agence Authentik, notre chauffeur et notre guide. Nous leur en sommes très reconnaissants — c’est aussi grâce à eux que nous n’avons pas modifié nos plans de voyage.
VOVworld: Qu’avez-vous pu visiter malgré tout?
Dominique Luneau: Le jeudi matin, la pluie s’était calmée et quelques rayons de soleil perçaient. Tous les sites importants de Hué restaient fermés. Avec notre chauffeur et notre guide, nous avons visité la pagode Tu Hiêu, l’extérieur du mausolée du roi Tu Duc, puis l’ancien parc aquatique. En fin d’après-midi, nous avons pu approcher la citadelle, car le niveau de la rivière des Parfums avait baissé.
Partout, les stigmates de l’inondation étaient visibles: rues recouvertes de boue, branches et débris emportés par l’eau. Le lendemain matin, nous avons enfin pu visiter la citadelle, bien qu’il restât encore par endroits de larges flaques d’eau.
Le charme mélancolique de Hué… c’est ce que j’ai ressenti, notamment devant le mausolée de Tu Duc et à la pagode Tu Hiêu. Il faut dire que ma femme et moi sommes originaires de l’ouest de la France, où la pluie, sans être aussi intense, confère elle aussi ce charme mélancolique aux paysages.
Isabelle Luneau dans une boutique à Huê. Photo fournie par DL. |
VOVworld: Si vous deviez décrire Hué en trois mots, malgré — ou grâce à — la pluie?
Dominique Luneau: Demain sera meilleur!
VOV5world: …et un souvenir fort de ce voyage?
Dominique Luneau: Un sourire échangé avec un habitant, les pieds dans l’eau, le soir de notre arrivée. Et si l’occasion se présente, nous reviendrons souvent au Vietnam. Nous pensons visiter le Sud, ou la région de Sapa pour y faire des randonnées. Le Vietnam, c’est un peuple accueillant, actif, mais aussi combatif dans l’adversité — toutes des qualités que nous connaissions déjà, mais que nous avons pu mesurer de près.
VOVworld: Enfin, si vous deviez résumer votre aventure vietnamienne en une seule phrase?
Dominique Luneau: De l’eau, de l’eau — pour le meilleur et pour le pire.