L’ao toi de Yên Lạc, un patrimoine à préserver

(VOVWORLD) - L’ao toi, qui est une sorte de cape rudimentaire confectionnée à partir de feuilles de palmier séchées, protège les habitants de Yên Lac, un village rattaché à la province de Hà Tinh. Ces derniers tiennent absolument à préserver cette tradition artisanale qui résume à elle seule un art de vivre qui a traversé les siècles.   
L’ao toi de Yên Lạc, un patrimoine à préserver - ảnh 1L’ao toi, une sorte de cape rudimentaire que les Vietnamiens utilisent pour se protéger de la pluie et du soleil. Photo: Kim Liễu/VOV5

Dans les petites maisons nichées derrière les haies de bambous bordant les chemins du village, résonne le bruit des artisans qui confectionnent des áo tơi traditionnels. Et cela fait près de trois siècles qu’il en est ainsi… 

À Yên Lạc, les ao tơi se fabriquent tout au long de l’année, mais la haute saison se situe entre les 3e et 6e mois du calendrier lunaire. C’est le moment où les feuilles de palmier atteignent leur maturité, offrant la résistance et la souplesse nécessaires. Les feuilles de palmier mûres, le rotin et le giang (aganonerion polymorphum, pour les spécialistes…) - les principaux matériaux pour confectionner l’ao tơi - sont principalement récoltés à Khê Giao et dans les communes montagneuses de l’ancien district de Huong Khê, comme nous l’explique Nguyên Van Thuân, 57 ans, qui a près de 40 ans d’expérience dans la confection des ao toi.

L’ao toi de Yên Lạc, un patrimoine à préserver - ảnh 2Pour de nombreux paysans, l’ao toi est considéré comme un compagnon face aux rigueurs du climat. Photo: Kim Liễu/VOV5

“La récolte des feuilles est l’étape la plus difficile. Les artisans partent dès 4 heures du matin pour se rendre à Huong Khê. Si la récolte a été suffisamment bonne, ils rentrent le soir même, sinon, ils restent jusqu’au lendemain. Les feuilles sont ensuite séchées trois jours au soleil et deux nuits”, nous dit-il.  

La confection d’un ao toi exige de la patience, de la minutie et de l’habileté. Le choix des feuilles est crucial: elles doivent être à maturité, ni trop jeunes ni trop vieilles. Après la récolte, elles sont séchées au feu de bois de façon à ce que leur couleur vire au blanc. Elles sont ensuite roulées en bottes et séchées encore deux jours et une nuit, jusqu’à ce qu’elles s’feouvrent et deviennent bien résistantes.

L’ao toi de Yên Lạc, un patrimoine à préserver - ảnh 3Les femmes de la coopérative de Yên Lac confectionnent des ao tơi traditionnels. Photo: Kim Liễu/VOV5

Pour confectionner un ao tơi, l’artisan utilise un gabarit en bois de 1 mètre 20 pour disposer les feuilles de palmier. Il dispose également de 5 à 7 baguettes en bois, larges de 3 centimètres et longues d’un mètre, pour maintenir les feuilles bien en place. Celles-ci sont disposées les unes sur les autres en tuilage, puis cousues à l’aide d’une aiguille en métal d’environ 25 centimètres et de fils de rotin. Un ao toi comporte généralement cinq rangées de couture en rotin. Le col est la partie la plus importante. Les feuilles utilisées pour le tisser doivent être uniformes, superposées en plusieurs couches et cousues solidement à angle droit. Une lanière en rotin est fixée sur le dessus pour maintenir l’ao tơi bien en place sur le dos. Pour Pham Van Hung, un artisan du village, le travail du col est primordial. 

“L’étape la plus délicate est celle du tissage du col. Cette partie complexe nécessite 2 à 3 couches de feuilles. Il faut toujours commencer par le col, sinon on ne peut pas aller plus loin”, nous indique-t-il.

La commune de Xuân Lôc, à laquelle est rattaché Yên Lac, compte environ 188 foyers, dont les deux tiers perpétuent encore le tissage des ao tơi. Pendant la haute saison, lorsque la demande explose, le revenu moyen des artisans peut atteindre 16 ou 17 millions de dôngs par mois (606 à 641 dollars). Pour préserver et valoriser ce savoir-faire traditionnel, une coopérative a vu le jour en 2022 avec 25 membres, afin de développer de nouvelles stratégies et d’élargir le marché. Dang Dinh Vinh, qui a été en son temps président du comité populaire de la commune de Quang Lôc, estime qu’il y a là un argument économique à faire valoir.  

“Les áo toi se vendent partout au Vietnam et s’exportent même au Laos. Par temps chaud, la demande augmente et les habitants passent généralement commande via la coopérative. Celle-ci a été créée pour soutenir les artisans et promouvoir leurs produits, l’idée étant de les rendre accessibles à un marché plus large”, nous explique-t-il. 

L’ao toi de Yên Lạc, un patrimoine à préserver - ảnh 4Le village de Yên Lac, commune de Xuân Loc, perpétue l’art du tissage de l’ao tơi depuis plus de 300 ans. Photo: Kim Liễu/VOV5

Grâce aux efforts de promotion de la coopérative, cette fameuse cape de feuilles de palmier séchées de Yên Lac suscite un intérêt grandissant auprès des acteurs du tourisme. C’est en tout cas ce qui ressort des propos de Nguyên Quôc Hiêp, le directeur du Centre d’apprentissage communautaire de la commune de Xuân Lôc.

“Récemment, nous avons organisé un circuit à l’intention d’élèves venus de la ville, pour leur permettre de découvrir les différentes étapes de fabrication de l’ao toi. Je dois dire que les enfants se sont montrés très enthousiastes et que c’est plutôt prometteur, en termes de préservation artisanale”, nous dit-il.    

Dans le tourbillon de la vie moderne, le fait que les habitants de Yên Lac continuent de préserver et de faire vivre l’ao toi illustre la vitalité des valeurs culturelles traditionnelles, un héritage précieux à transmettre et à faire rayonner.

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