(VOVworld) - Des centaines
d’instruments de musique traditionnels que possède le Vietnam, ceux
en bambou sont les plus anciens et les plus originaux. L’artisan populaire a su
faire de cette plante familière un excellent moyen d’expression de ses
sentiments. Ces instruments rythment la vie courante, le travail et les fêtes
de toutes les régions, toutes les communautés.
Les instruments de musique en
bambou constituent une famille nombreuse, originale sur le plan sonore et
diversifiée sur le plan des structures. C’est en tout cas l’avis de l’artiste
émérite Nguyen Thi Hoa Dang, doctoresse en ethnomusicologie, directrice
adjointe du département des instruments de musique traditionnels à l’Académie
nationale de musique du Vietnam.
«Au Vietnam, le sol et le climat sont
très favorables au bambou. Les entre-noeuds sont d’une épaisseur et d’une
longueur idéales pour qu’on en fasse des instruments de musique. Ce n’est pas
du tout le cas pour les bambous philippins ou chinois. Leurs entre-noeuds étant
courts et très épais, ça donne des sons secs, graves et sourds. La qualité
sonore du bambou vietnamien est bien meilleure, notamment au niveau de la
résonance. Nos instruments de musique en bambou sont une véritable fierté
nationale. »
Les instruments sont classifiés
en trois familles: les cordophones, les aérophones et les idiophones. Thao
Giang, directeur du Centre de développement de la musique du Vietnam, nous
donne une idée de la diversité de ces instruments:
«Le bambou sert à faire des
flûtes traversières, des flûtes de Pan, des guimbardes… Même la feuille de
bambou peut donner des sons lorsqu’on souffle dessus. Le rhizome, la tige
souterraine du bambou, sert à faire des blocs chinois, des baguettes ou des
castagnettes… Sur les hauts-plateaux, nous avons le T’Rưng, le Trinh, le Kơ Ní,
le Đinh Tút… En plaine, nous avons la viole à deux cordes, la cithare à seize
cordes et toutes sortes de tambours en bambou. Chaque groupe ethnique donne à
ses instruments une échelle et une vibration qui leur sont propres. Dans ce
domaine, la créativité populaire est énorme.»
Si les instruments en bambou sont
aussi populaires, c’est parce qu’ils ont été créés à partir d’un matériau
rudimentaire qu’on trouve partout, dans le jardin, dans le village, dans la
forêt. Mais leur simplicité n’affecte en rien leur capacité de séduction,
soutient Nguyen Thi Hoa Dang:
«Kinh, Mông, Thái, Tày, Nùng,
Giarai, Ê Đê… la quasi-totalité des ethnies vietnamiennes dispose d’instruments
de musique en bambou. Les plus représentatifs de ces instruments sont le T’Rưng
et le monocorde, qui sont particulièrement appréciés par les étrangers. Dans
bien des pays, la fabrication d’instruments est devenue un travail mécanique,
mais chez nous, elle reste artisanale, ce qui donne à nos instruments un aspect
simple, authentique et original.»
Les instruments de musique en
bambou sont présents dans toutes les formes de musique ayant été classées par
l’UNESCO au patrimoine culturel mondial, que ce soient le chant xoan de Phu
Tho, le ca trù, le quan ho, la musique de cour de Hue ou le don ca tai tu du Sud. Certains
n’existent qu’au Vietnam,
comme le monocorde, le T’rưng, ou la guimbarde de bambou …
A travers les vicissitudes de
l’histoire, les instruments de musique continuent d’exprimer les sentiments et
les espoirs des Vietnamiens. Constitutifs de l’identité nationale, ils relient
les communautés ethniques du pays entre elles et à celles du monde entier.