(VOVWORLD) - Dans le tourbillon de la modernisation, la province de Binh Duong mène une bataille déterminée pour sauvegarder ses trésors artisanaux. Tels des gardiens d’un patrimoine millénaire, les artisans locaux façonnent encore aujourd’hui la laque, l’argile et le bois avec des gestes qui ont été transmis de génération en génération.
L’artisanat de vannerie, pratiqué de longue date à Binh Duong. Photo: Thiên Ly/VOV |
La carte artisanale de Binh Duong impressionne par sa diversité: 32 villages artisanaux et 9 métiers traditionnels constituent un conservatoire vivant des techniques ancestrales. La laque à Tuong Binh Hiêp, la céramique à Lai Thiêu, Tân Phuoc Khanh et Chanh Nghia, ou encore la sculpture sur bois à Phu Tho et An Thanh forment un écosystème culturel unique, désormais reconnu au niveau national.
La laque de Tuong Binh Hiep, élevée au rang de patrimoine culturel immatériel national en 2016, incarne cette quête de transmission. Nguyên Van Quy, le vice-président de l’Association des laqueurs de la province, nous en dit plus...
“Au-delà des actions de promotion commerciale et de soutien à la production, nous avons mis l’accent sur la formation. Notre artisanat ne peut survivre sans relève. C’est pourquoi nous mobilisons nos meilleurs artisans pour transmettre leurs connaissances aux jeunes générations”, nous explique-t-il.
La céramique de Binh Duong se distingue par ses formes variées. Photo: Thiên Ly/VOV |
Si les céramiques de Binh Duong ont conquis les marchés internationaux avec des marques prestigieuses comme Minh Long, Cuong Phat et Phuoc Du Long, l’industrie traverse aujourd’hui une période d’incertitude. Conflits géopolitiques et pandémies ont drastiquement réduit les commandes, mettant en péril ce savoir-faire séculaire. Les ateliers, majoritairement familiaux, manquent de capital pour se moderniser ou se relocaliser. Plus délicat encore, les artisans qualifiés sont ancrés dans leurs communautés et ne peuvent simplement pas déménager avec leurs ateliers. Nguyên Tiên Thành, président de l’Association de céramique de Binh Duong, dresse un constat lucide sur les défis structurels.
“Nous appelons les autorités à créer des zones industrielles spécialisées à proximité des sites actuels, permettant une transition progressive. Cela garantirait que notre savoir-faire puisse s’adapter aux exigences contemporaines sans perdre son âme”, nous dit-il.
Face à la menace d’extinction de ces savoir-faire, Binh Duong a opté pour une stratégie audacieuse: l’éducation gratuite. Les futurs artisans étudiant la laque et la sculpture à l’École provinciale des beaux-arts et de la culture sont désormais exemptés de frais de scolarité. Hô Truc Thanh, directeur adjoint du service provincial de l’Agriculture et de l’Environnement, précise la stratégie provinciale.
“Nous travaillons activement avec le Comité populaire pour développer des mécanismes qui permettent aux maîtres artisans d’intégrer nos programmes de formation professionnelle. Notre objectif est double: préserver l’essence même de ces métiers traditionnels tout en permettant aux nouvelles générations d’y insuffler leur créativité”, précise-t-il.
Des responsables de Binh Duong en visite dans un atelier. Photo: Thiên Ly/VOV
|
Mais la simple préservation ne suffit pas. Nguyên Van Dành, le président de l’antenne provinciale du Front de la patrie du Vietnam, esquisse une vision plus ambitieuse.
“Nous voulons créer un environnement où les villages artisanaux puissent évoluer vers une forme plus moderne en intégrant les nouvelles technologies. L’enjeu est de transformer ces pratiques ancestrales en véritables moteurs économiques, notamment en les liant au développement touristique”, nous indique-t-il.
À Binh Duong, le patrimoine n’est pas figé dans les vitrines des musées. Il respire dans les ateliers, s’adapte aux contraintes du marché et se réinvente sans cesse. Ce "réveil" des villages artisanaux traditionnels illustre une approche équilibrée du développement, où l’héritage culturel devient un moteur économique plutôt qu’un vestige à protéger.