(VOVWORLD) - Le «Cà ràng» est un four en argile, emblématique du sud du Vietnam. Caractérisé par son trépied et un fond en forme de huit, ce four est spécialement conçu pour résister à des températures élevées. La commune de Phu Tho, qui est situe dans la province d’An Giang, a fait de la fabrication de ces fours son artisanat numéro un.
Le «Cà ràng» reste incontournable dans les cuisines de nombreuses familles du Sud, malgré la variété de fours disponibles aujourd'hui. Photo: Huynh Nhi/Lao Động. |
À Phu Tho, des fours en argile sèchent au soleil, créant un paysage pittoresque. Autrefois, les commerçants les transportaient par bateau et les vendaient dans d'autres localités telles que Cân Tho, Vinh Long et Hâu Giang.
Nguyên Van Dô, lui, fabrique des fours depuis bien longtemps. Pour lui, c’est un véritable atavisme familial…
«J’appartiens à la troisième génération de fabricants de fours. Dans mon atelier, on est tous à peu près de la même génération, par contre. C’est vrai que les bénéfices sont modestes, mais c’est vraiment un métier qui me passionne, alors je continue», nous dit-il.
Dans un «Cà ràng», on peut insérer du bois de chauffage, ce qui permet de générer rapidement une chaleur intense pour la cuisson. Les fours se déclinent en plusieurs types, classés selon leur taille et leur nom, mais leur fabrication suit un processus en 18 étapes, incluant le mélange des terres et des cendres, la création des moules et la cuisson, qui dure plus de 24 heures.
Chaque étape est confiée à une personne, et chaque tâche est accomplie avec précision et effectuée entièrement à la main. Le mélange des terres, des cendres, des balles de riz et du sable respecte une «recette secrète» que seul le propriétaire de l’atelier connaît, garantissant ainsi la qualité et l'esthétique des produits.
Dans la commune de Phu Tho, la beauté des «Cà ràng» est principalement due au travail des femmes, lesquelles représentent jusqu'à 80% de la main-d'œuvre.
Les «Cà ràng» de Phu Tho ont eu leur âge d’or, entre 1975 et 1979. On comptait alors une bonne centaine d’artisans en activité. Nguyên Van An s’en souvient encore…
«Ça fait un bon siècle qu’on fabrique des fours, ici! Autrefois, c’était un métier en plein essor qui permettait à un grand nombre d’artisans de vivre confortablement. Si l’État avait alors investi dans ce secteur, il aurait pu se développer encore davantage», regrette-t-il.
À cette époque bénie, chaque artisan pouvait fabriquer jusqu'à 30 fours par jour, produisant ainsi plus de 360.000 pièces par an!... Surtout à l'approche de la fête du Têt, les artisans travaillaient jour et nuit pour honorer les commandes, comme nous le raconte Trân Ngoc Minh.
«C’est un métier familial qui s’est transmis de mon grand-père à mon père, puis à moi. J’y suis très attachée. Nos fours sont particulièrement prisés pendant le Têt: de nombreuses familles remplacent leurs vieux fours par des neufs!», nous explique-t-elle.
À l'époque bénie, le village de Phu Tho fournissait plus de 360.000 pièces par an. Photo: Kim Loan / VOV Trafic |
Modernisation oblige, les «Cà ràng» du delta du Mékong sont progressivement remplacés par des réchauds à gaz et des cuisinières électriques. Actuellement, seuls 30 foyers de la commune de Phu Tho se consacrent encore à la fabrication des fours. Les marchands les vendent dans d’autres provinces, telles que Tiên Giang, Cà Mau, Soc Trang et Dông Thap. Tous les deux mois, les marchands viennent chercher environ 300 fours pour la vente, nous explique Nguyên Ngoc Thuong, propriétaire d’un atelier à Phu Tho.
«Les marchands locaux achètent nos produits pour les revendre dans d'autres régions. Le prix reste stable, y compris au moment du Têt», nous confie-t-elle.
Les autorités du district de Phu Tân ont pris de nombreuses mesures pour aider les artisans du village à perpétuer leur métier. Grâce à des prêts, ceux-ci investissent dans la mécanisation afin d’améliorer la qualité et de diversifier leurs produits. Aujourd'hui, les «Cà ràng» de Phu Tho, prisés pour leur authenticité, sont utilisés par de nombreux restaurants comme éléments décoratifs évoquant les modes de vie d'antan. Le village préserve ainsi son artisanat ancestral tout en créant un produit du terroir. Pour Mai Quôc Viêt, le vice-président de la commune de Pho Tho, c’est déjà un succès…
«La préservation de notre village est essentielle, car elle permet de sauvegarder notre artisanat ancestral et d’assurer un revenu aux travailleurs. Cela contribue également au développement économique de la région. Nous avons examiné les possibilités de financement par le biais des banques pour aider les artisans à faire prospérer leur activité», nous indique-t-il.
Bien que son âge d’or soit révolu, le «Cà ràng» conserve une forte valeur émotionnelle. Étroitement lié aux coutumes et aux traditions des habitants du Sud, il représente un pont entre le passé et le présent.