Les hommes Hà Nhi font preuve d’une grande habileté dans la création d’objets du quotidien. Photo : Khắc Kiên/VOV

Dès l’aube, le village de Ka Lang s’anime. Les maisons en terre battue laissent s’échapper un doux panache de fumée, l’odeur du riz fraîchement pilé se mêlant à celle de l’alcool de maïs, tandis que montent rires et saluts de bienvenue. Le Hô Su Chà, célébré le premier jour du Dragon du dixième mois lunaire, a lieu cette année un mois plus tôt en raison du mois intercalaire, à la fin des récoltes, lorsque chacun peut enfin se reposer et se réunir. Ly Xa Pu est une villageoise très attachée à la tradition.

«Pour le Hô Su Chà, nous nettoyons la maison, préparons des gâteaux de riz pilé, abattons un cochon et rendons hommage aux ancêtres. Chaque foyer dresse un plateau avec viande, alcool et gâteaux pour remercier le ciel et la terre, exprimer sa gratitude aux ancêtres pour les récoltes et la santé de la famille. C’est l’occasion pour les enfants revenus de loin de retrouver le village. Tout le monde est heureux!», nous confie-t-elle.

Les femmes Hà Nhi confectionnent souvent elles-mêmes leur plus belle tenue pour la porter pendant le Têt. Photo : Khắc Kiên/VOV

Cette année, la fête coïncide avec le festival culturel des ethnies locales, donnant à Hô Su Chà un éclat particulier. Vêtues de leurs costumes éclatants, les femmes Hà Nhi brodent et retouchent jupes et étoffes, tandis que les hommes se mesurent aux concours de tir à l’arbalète, de tir à la corde ou de lancer de balles d’étoffe. Les jeux traditionnels animent la place du village et attirent habitants comme visiteurs.

Les repas du Têt, préparés avec abondance, traduisent le souhait d’une nouvelle année paisible. Photo : Khắc Kiên/VOV

Chu Te Hu, lui, représente un autre village, Me Giong.

«Nous avons préparé un cochon que nous abattons le Jour de l’An traditionnel. En observant le foie, nous prédisons les récoltes à venir. Pendant les jours de fête, nous préparons de grands repas pour recevoir amis, voisins et voyageurs»,  partage-t-il.

Parmi les visiteurs, Nguyên Van Binh, originaire de Nghê An…

«Nous ressentons ici l’esprit du Nouvel An traditionnel et l’accueil chaleureux des Hà Nhi. Les familles préparent ensemble les repas, accueillent les enfants de retour au village. Nous avons partagé les danses en ronde et l’hospitalité des habitants. J’espère revenir bientôt pour retrouver cette atmosphère unique», déclare-t-il.

Examiner le foie de porc au début de l’année pour présager les récoltes à venir fait partie des traditions des Hà Nhi. Photo : Khắc Kiên/VOV

Le Hô Su Chà est devenu aujourd’hui un atout touristique majeur pour les villages frontaliers de Lai Châu. Nguyên Truong Giang, secrétaire du comité du Parti et président du conseil populaire de Thu Lum, rappelle que la commune a fixé pour priorité de «préserver l’identité culturelle en lien avec le développement du tourisme communautaire». Il insiste sur la nécessité de protéger les maisons et les coutumes traditionnelles, ainsi que de valoriser les produits locaux - alcool de maïs, gâteaux de riz pilé, tissages - pour renforcer l’attractivité de la région.

«Le Commandement de la Garde-frontière a envoyé des soldats participer aux activités des cellules du Parti dans les villages. Leur présence aide à sensibiliser la population à la préservation culturelle associée au tourisme communautaire. Le Nouvel An traditionnel est une occasion privilégiée d’échanges entre différentes communautés, où les habitants apprennent à mieux comprendre les traditions de chacun», ajoute-t-il.

Au rythme des tambours et des gongs, bercés par le murmure des ruisseaux, dans les parfums mêlés d’alcool de maïs et de gâteaux de riz pilé, les Hà Nhi placent dans leur fête l’espoir d’une année nouvelle paisible et prospère. Aux confins occidentaux du pays, le printemps revient tôt, portant avec lui la beauté simple, profonde et durable d’une culture authentique.