(VOVWORLD) - Les Ede, qui constituent une communauté ethnique des Hauts plateaux du Centre, possèdent un riche patrimoine littéraire en vers. Si leurs épopées sont de longs poèmes, leurs contes se déclinent aussi en vers. Dans la province de Dak Lak, le district de Cu Mgar est la terre d’élection des tenants de cette tradition. Ils sont aujourd’hui au nombre de 318, et la plupart d’entre eux se trouvent dans la commune d’Ea Tul.
Le maître conteur Ywang Hwing (droite) et Y Dhin Niê (photo: VOV) |
Après le dîner, Hnai Niê raconte à ses enfants l’histoire d’une fille démunie et méprisée qui, grâce à son labeur, finit par gagner le cœur du chef du village, lequel ira jusqu’à l’épouser… Le couple vivra ensuite dans le bonheur et la prospérité, comme il se doit en pareil cas…
Hnai Niê a appris ses premiers contes en vers en 2004 à l’occasion d’un cours organisé pendant trois mois par l’Institut d’études sur le folklore vietnamien, en collaboration avec le service culturel du district de Cu Mgar.
« Les autres personnes, qui savaient lire, ont appris les contes écrits, alors qu’à moi, on a donné des enregistrements que j’ai appris par cœur, morceau par morceau », raconte-t-elle. « Je répétais assidûment jusqu’à tout mémoriser… Maintenant, je vais apprendre ces contes à mes enfants, à mes petits-enfants et à tous mes proches qui le souhaitent ».
Y Dhin Niê a suivi la même classe que Hnai Niê. Chaque jour après la classe, il allait chez les seniors du village pour les écouter raconter d’autres histoires.
« Les contes en vers ont bercé mon enfance et je souhaite qu’il en aille de même pour mes descendants », dit-il. « Moi, je veux encore apprendre, mais il ne reste plus beaucoup de monde capable de transmettre ce patrimoine ».
Photo: VOV |
L’art de s’exprimer en vers se dit « Klei duê » en langue Ede, Klei signifiant « paroles » et duê, « legato ». « Klei duê » se rapporte donc à des paroles liées par des rimes. Cette forme apparaît dans tous les genres littéraires traditionnels Ede tels que les contes de fée, les épopées, les prières, les devinettes, les comptines… Par ces vers, ce peuple résume les expériences qu’il a acquises de génération en génération sur la nature et la vie humaine. C’est donc un art qui s’enrichit avec le temps, explique le maître conteur Ywang Hwing.
« Pour attirer les jeunes qui connaissent mal le vocabulaire ancien, il faut leur présenter des morceaux beaux mais courts et faciles à comprendre », estime-t-il. « Mais on peut aussi leur parler de nouvelles pratiques encouragées par la loi, de mariage, de bonheur familial, de développement économique… L’important est de perpétuer cette tradition de donner des conseils en vers ».
Les autorités de Dak Lak ont confié à la commune d’Ea Tul la mission d’élaborer un dossier scientifique sur l’art de s’exprimer en vers des Ede, dossier qui sera soumis au ministère de la Culture, des Sports et du Tourisme, en vue d’une inscription au patrimoine culturel immatériel national.